Anouck Pascal
Afrique / Comportement animal
12 septembre
22 septembre 2025
Anouck Pascal
Afrique / Comportement animal
Nous atterrissons en début de matinée dans le petit aéroport d’Ísafjörđur située dans les West Fjords de l’Islande. Littéralement le nom de cette ville signifie fjord du glace. Il s’agit de la ville la plus peuplée, ainsi que le chef-lieu de la région des Vestfirðir, les fjords de l’ouest. La ville vivait essentiellement de la pêche mais suite aux restrictions dont a souffert l’industrie de la pêche dans les années 80, Isafjörður a vu sa population fuir la région et est passée en 30 ans de 3500 habitants à 2500 aujourd’hui.
Les conditions météo au large ne nous permettent malheureusement pas de larguer les amarres aujourd’hui pour rejoindre le Groenland. Trop de vent, trop de vagues. Nos guides font en sorte de nous trouver des activités à faire ici, bien que nous soyons déjà hors saison pour le tourisme.
Cet après-midi sera donc consacré à une visite de la ville, dans un temps bruineux et froid. L’hiver arrive vite dans la région. Le centre-ville d’Isafjordur est situé sur une grande péninsule au milieu du fjord, qui s’étend presque jusqu’à la rive opposée. Les deux côtés de la péninsule abritée sont donc idéaux pour le transport maritime, ce qui confère à la ville une importance stratégique considérable.
Toute la ville a une aura nordique et comprend de nombreux exemples d’architecture nordique. Les petits cottages dont les murs sont recouverts de tôle ondulée colorée protègent le bois et isolent l’intérieur des intempéries. La tôle ondulée a été adoptée dans toute l’Islande au début du XXe siècle comme complément bon marché et facile à entretenir aux vieilles constructions en bois, à tel point qu’elle est aujourd’hui synonyme de l’ensemble de l’architecture du pays. Nous visitons l’ancien hôpital devenu centre culturel important et qui abrite une bibliothèque, des archives, une collection d’œuvres d’art et des expositions.
Ce matin certains sortent à nouveau en ville pour faire quelques achats, puis Anouck nous parle des cétacés de l’Arctique lors d’une conférence, où l’on en apprend sur la vie des baleines à bosse ou encore sur les orques.
Après le déjeuner nous partons en minibus pour aller voir la plus grande des chutes d’eau de la région des Vestfirðir : la cascade Dynjandi, aussi appelée Fjallfoss. Nous profitons de la route pour apprécier le paysage islandais verdoyant, fait de montagnes tabulaires dans cette région, et bien sûr de multiples cascades ici et là, ainsi que des moutons. En arrivant dans la sinueuse route 60 au niveau de la bifurcation, on aperçoit déjà la majestueuse cascade qui domine le fond du fjord.
La cascade est composée d’une série de 7 chutes ayant chacune son propre nom (Gongumannafoss, Strompglufrafoss, etc.) et dont la plus grande est nommée Dynjandi, en français « étourdissant ».
A elle seule, Dynjandi fait 100 mètres de haut, pour environ 30 mètres de large au sommet et 60 mètres en bas de la falaise. En termes de hauteur, c’est la sixième chute du pays. Elle est souvent appelée la perle des Fjords de l’Ouest ou encore le voile de la mariée en raison de son grand manteau blanc. Elle est considérée comme l’une des plus belles chutes d’eau d’Islande.
Nous sommes subjugués par la beauté du site. La lumière du soleil illumine les montagnes environnantes. Il ne pleut pas et nous sommes protégés du vent au fond du fjord. Nous sommes quasi seuls sur le site. Un moment très agréable.
Aujourd’hui nous allons visiter le petit musée du Patrimoine des Westfjords. Le musée est basé sur le patrimoine maritime et donne un aperçu de la pêche locale et de l’industrie de la pêche des fjords de l’Ouest ainsi que de la vie des pêcheurs, de leurs familles et de la culture côtière à travers les siècles.
Un ancien entrepôt de poisson salé de 1784, magnifiquement restauré, abrite le musée, situé dans le quartier de Neðstikaupstaður. Autrefois, il servait de lieu de commerce pour le poisson et d’autres marchandises, car il était proche du port. Plusieurs autres bâtiments se trouvent au même endroit, donnant l’impression de pénétrer dans un petit village historique.
La majeure partie de la collection du musée se compose d’objets historiques liés à la pêche et à l’industrie de la pêche autour des fjords de l’Ouest. Parmi les pièces intéressantes, on trouve une collection d’accordéons, une collection de vieux bateaux.
Il nous faudra encore un peu de patience avant que notre navire ne largue les amarres pour le Groenland.
Enfin les côtes du Groenland et nos premiers icebergs sont visibles. Nous entrons dans le Scoresby Sund situé juste en dessous du parc national.
Le Scoresby Sund, en groenlandais Kangertittivaq, a une structure arborescente, avec un corps principal d’environ 110 km de long qui se ramifie en un système de fjords couvrant une superficie d’environ 38 000 km 2. Le plus long des fjords s’étend sur 340 à 350 km à l’intérieur des terres à partir de la côte. C’est l’un des systèmes de fjords les plus grands et les plus longs au monde.
Son nom rend hommage à l’explorateur anglais William Scoresby, qui a cartographié en détail la zone du fjord en 1822. Le mot scandinave « sund » qui signifie détroit, est couramment utilisé pour décrire les voies navigables étroites entre les masses continentales.
Le territoire qui entoure le fjord est principalement montagneux, avec des pentes abruptes. Sa partie sud est une paroi basaltique abrupte de 1 000 à 2 000 m de haut, tandis que son côté nord est plus bas et plus arrondi.
Ce matin nous partons en zodiac explorer la baie de Borg, situé sur la rive sud du fjord. Au fond se trouve un glacier. Nous admirons les icebergs avec leurs diverses formes et couleurs. Les flancs de falaises sont faits de basaltes avec par moment des formations de type orgues bien distinctes. Tout est paisible, nous entendons le crépitement des bulles d’air s’échappant des icebergs. Mais le front de glace déchiqueté et fracturé montre que c’est un glacier très actif. Nous assistons d’ailleurs à un petit vêlage. Un phoque marbré montre furtivement sa tête avant de disparaître. Les montagnes sont saupoudrées de blanc, l’hiver arrive à grands pas.
L’après-midi le Nanook reprend sa route sur la mer du Groenland en direction du nord. Nous longeons la péninsule de Liverpool, appelée parfois Alpes de Liverpool. Cette chaîne de montagnes de plus de 1000 m d’altitude est la terminaison nord de la chaîne calédonienne (dont une autre partie se trouve au Spitzberg, en Scandinavie, en Écosse et en Irlande). Elle date de plus de 430 millions d’années, avant la création du rift de l’Atlantique. Les roches sont caractérisées par des quartzites, des micaschistes, des schistes et un peu de granites.
Le soir, alors que nous naviguons encore vers le fjord du roi Oscar, nous observons des aurores boréales.
Réveil sous un ciel bleu éclatant. À 7h30, le Nanook jette l’ancre dans l’immensité calme de Segelsällskapet. Autour d’un petit déjeuner généreux, l’excitation est déjà palpable. Depuis le pont, six lièvres arctiques se laissent observer, paisibles, occupés à brouter sur la berge. Une belle promesse pour la journée.
À 9h, nous quittons le navire en zodiac. Cap sur ce site géologique unique, un véritable livre ouvert sur des millions d’années. Depuis l’eau, les parois semblent peintes à la main : jaunes clairs, rouges profonds, violets inattendus. Certaines strates, tachées de pigments, rappellent les peintures rupestres aborigènes. Les appareils photo crépitent.
Nous débarquons sur une petite plage. À peine à terre, nous découvrons les vestiges d’un piège à renard, vestige de l’époque des trappeurs. Bois usé, pierres lourdes, planches inclinées : on devine encore son fonctionnement, pensé pour préserver la précieuse fourrure des animaux. Ces dispositifs pouvaient autrefois s’étendre sur des kilomètres.
Alors que nous poursuivons nos observations, Laurence s’écrie : un renard arctique ! Mais pas le classique manteau blanc : un pelage sombre, presque chocolat. Contre toute attente, il ne fuit pas. Au contraire, il joue. Il bondit, nous approche, disparaît, revient… vingt minutes d’un ballet improbable, entre curiosité et malice. Un moment suspendu.
Nous reprenons notre marche, progressant lentement dans les pierriers. Deux lièvres arctiques croisent notre chemin, occupés à se toiletter sans se soucier de notre présence. Décidément, la chance est avec nous.
Au col, le souffle nous échappe devant le panorama. Les montagnes, striées de roches métamorphiques aux couleurs éclatantes, contrastent avec les sommets encore poudrés de neige récente. En contrebas, le Nanook paraît minuscule dans le fjord. Sur l’autre versant, un lac se dévoile, miroir tranquille. Un bœuf musqué broute au bord de l’eau, trois autres somnolent un peu plus haut, baignés de soleil.
Nous restons longtemps à contempler cette scène, savourant le privilège d’être là. Puis vient le moment de redescendre. Le zodiac nous attend pour regagner le Nanook. Le déjeuner est prêt, et il faut bien avouer que cette matinée riche en émotions a creusé l’appétit de tout le monde.
L’après-midi, nous explorons l’île de Maria, à quelques heures seulement de notre site de ce matin.
Un ancien poste météorologique allemand de la Seconde Guerre mondiale. Devant nous les vestiges de cette période sombre de l’histoire sont là.
Bidons rouillés, vaisselle et outils abandonnés, embarcations, lampe à pétrole hors d’usage, témoignent de la dure vie des soldats isolés ici. L’histoire est figée sur cet île.
Nous continuons notre marche et découvrons ensuite un petit lac bordé de traces de vie de différentes espèces d’oiseaux, eider, oies à bec on nichés là durant la période estivale au sol d’innombrable plume et fientes, nous le prouve.
Nous grimpons ensuite vers un pierrier à la recherche de fossiles de stromatolithes : après quelques efforts, la récompense est au rendez-vous.
Les paysages autour de nous sont féerique, sommet enneigés, lumière douce de fin de journée.
Sur le chemin du retour, l’émotion monte encore d’un cran en trouvant des traces fraîches du roi de l’arctique, l’ours Polaire est passé par la, il y a peu de temps.
Le retour en zodiac se fait sous un soleil couchant, les sommets enneigés se teintant de rose et d’orangé. De retour sur le Nanook, thé, pâtisseries et sauna réchauffent les esprits, avant un briefing sur la formation des Icebergs fait par Anouck notre guide : demain, cap sur un front de glace et un cimetière d’icebergs, sous un soleil annoncé radieux avec des températures bien en dessous de zéro.
Un vrai goût d’Arctique va s’offrir à nous.
Tout le monde part se coucher tôt, des images pleins la tête, et déjà une excitation palpable pour la journée de demain…
Le jour se lève sous un ciel bleu éclatant, sans nuages, illuminant les parois majestueuses du fjord. Depuis notre navire, la première vision est celle d’une nature brute et apaisante : l’eau calme reflète les montagnes enneigées et la lumière du matin danse déjà à la surface. Le réveil, dans cet écrin sauvage, offre une sensation de sérénité absolue.
Après le petit-déjeuner, l’aventure commence par une excursion en zodiac. L’embarcation fend les eaux froides et limpides, se dirigeant vers l’un des joyaux du parc : le glacier Nordenskjöld. Tout autour, des icebergs immenses, détachés du front glaciaire, dérivent lentement. Sculptés par le vent et la mer, ils se présentent sous des formes étonnantes. Le soleil les révèle dans toute leur complexité : sur leurs parois se dessinent parfois de fines lignes bleues, comme des veines de cristal. Ici et là, des cupules, larges cavités arrondies, parsèment leurs flancs. Nous passons plusieurs heures à les admirer. Quelques phoques annelés furtifs semblent nous narguer. Arrivés devant le front du glacier, à distance de sécurité, nous coupons les moteurs pour apprécier le silence et le cliquetis des bulles d’air qui s’échappent du brash autour de nous.
L’après-midi nous sortons en zodiac à nouveau vers Paradisdalen. Un fjord petit fjord adjacent, long tout de même de 17 km ! En avançant dans le fjord, un iceberg attire soudain toute notre attention. Sa silhouette est différente des autres : au centre s’ouvre une arche immense, sculptée par le temps, le vent et la mer. Elle se dresse comme un portail monumental, une cathédrale éphémère faite de glace. Nous approchons en silence. L’eau est si calme qu’elle reflète l’arche à la perfection. Tournant autour nous constatons avec merveille qu’il y a une seconde arche ! Splendide et rare.
Nous partons ensuite vers la côte pour débarquer sur le site XXX. Les guides nous montrent les vestiges de la culture Thulé : cercles de pierres, restes d’anciens foyers, traces émouvantes de ce peuple arctique qui a su apprivoiser ces contrées hostiles des siècles durant. Nous visitons la petite cabane de trappeur, restaurée par Nanok, une association groenlandaise fondée pour préserver la mémoire des chasseurs et des explorateurs polaires. Ce sont eux qui restaurent et entretiennent encore aujourd’hui certaines de ces cabanes perdues dans l’immensité arctique.
Nous repartons en zodiac. Des bœufs musqués paissent tranquillement, leurs silhouettes massives sont recouvertes d’une toison épaisse. Ces animaux semblent tout droit sortis d’une autre époque : ils ont traversé les âges, survivant depuis la préhistoire aux glaciations successives. Les observer ici, immobiles ou avançant lourdement sur la toundra, c’est contempler une mémoire vivante du passé.
Tout à coup, une silhouette claire se détache sur la toundra. C’est un ours polaire. Il marche tranquillement puis s’éloigne un peu sur les hauteurs en nous voyant nous approcher. Puis il s’allonge, le museau posé entre ses pattes, et nous observe en silence.
Nous poursuivons notre exploration vers un endroit à la fois poétique et solennel : le cimetière d’icebergs. Là, d’immenses blocs de glace se sont échoués dans des eaux peu profondes. Prisonniers, ils fondent lentement, se fragmentent. Et c’est reparti pour une séance photos de ces sculptures géantes aux formes variés. On ne s’en lasse pas.
Alors que nous reprenons le chemin du navire, le fjord nous offre une dernière émotion : les montagnes se reflètent dans l’eau calme comme dans un miroir parfait. Le ciel, les sommets et la mer se confondent, effaçant la frontière entre le réel et son double.
Nous nous réveillons a l’ancre dans la baie de fleurs, il est 6h du matin face à nous se dresse le château du diable Étrange et majestueuse montagne du Parc national du Nord-Est du Groenland, le Château du Diable Teufelsschloss culmine à 1 303 m. Ses parois abruptes, composées de couches sédimentaires et volcaniques empilées comme un millefeuille, rappellent une forteresse naturelle. Ce décor spectaculaire a inspiré son nom, évoquant une citadelle surgie des enfers, emblème géologique de la région.
Après quelques heures de navigation nous arrivons sous un grand soleil, dans le Nordfjord. Cette journée sera consacrée à la contemplation de l’immense glacier Waltershausen, large de plus de 10 km et long de plus de 40 km depuis l’inlandsis vers la mer.
Depuis les ponts extérieurs nous voyons dans la vallée plusieurs bœufs musqués et un renard arctique encore en manteau blanc d’hiver.
Le matin, après une navigation dans le brash où nous croisons une petite famille de canards eiders, ainsi que quelques bœufs musqués sur la toundra , nous débarquons sur une plage proche du glacier. De là nous partons pour une marche sur une petite colline afin de surplomber le front du glacier. La vue est à couper le souffle. Les failles et séracs donnant un aspect très fracturé à sa surface sont très visibles. Nous observons également une grotte creusée par les vagues sur le front, avec un très bel effet miroir.
Quelques icebergs se retournent. On entend quelques craquements sourds.
L’après-midi nous ressortons cette fois-ci en zodiac pour une longue croisière le long du front du glacier. La perspective depuis la surface de l’eau est tout aussi impressionnante que celle du matin. Nous observons dans l’eau plus d’une dizaine de phoques annelés et un barbu. Nous sommes surpris à plusieurs reprises par des craquements et petits vêlages. Le brash tout autour de nous indique que le glacier est très actif.
Après trois heures de balade nous rentrons au Nanook pour un goûter savoureux.
Le soir Hervé nous parle des bœufs musqués et Anouck des icebergs. Puis nous sortons sur le pont pour contempler les couleurs rosées du soleil couchant sur les montagnes alentour et les icebergs.
La nuit dernière nous avons navigué vers le sud-est pour arriver ce matin à l’entrée du Vega Sund. De multiples îles de tailles variées en font un lieu propice à l’exploration en zodiac, multitudes de côtes où pourraient se trouver des plantigrades…
Notre réveil est matinal car des ours ont été vus par notre officier de quart. Tout le monde s’habille en vitesse et se précipite en passerelle. 4 ours ! Un mâle et une femelle avec deux petits. Celle-ci s’éloigne en courant et rejoint la rive avec sa progéniture. Ils vont à l’eau. Un gros mâle pourrait tout à fait s’en prendre à eux, notamment en période de disette comme en fin d’été. Nous sommes assez loin mais sommes ravis de cette observation.
Après le petit déjeuner nous filons sur les zodiacs pour essayer de les retrouver, eux ou bien d’autres… Sur la petite île de XXX un ours est assis non loin du rivage. Nous l’avons surpris car il met un petit instant avant de se lever et tourner les talons pour s’éloigner. Il est bien arrondi et massif. Un ours peu doubler de volume lors d’une bonne saison afin de passer l’hiver. En général ils prennent entre 30 et 40 % de leur poids. De l’autre côté d’une pointe il finit par aller à l’eau. Nous ralentissons afin de le laisser traverser. Cependant il ne semble pas vouloir quitter son île. Il nage doucement l long de la rive. Nous le suivons à bonne distance, l’animal ne semblant pas stressé. Au bout d’une demi-heure d’observation nous le laissons tranquille. C’est en nous voyant partis qu’il décide de sortir de l’eau et remontes-en haut de l’île.
La météo est encore plus que clémente : grand ciel bleu et soleil. Cette croisière aura été un sans-faute de ce côté-là. Nous continuons notre recherche sur la côte est du fjord. Les fonds sont par endroits très peu profonds entre les îles, l’eau limpide nous permet de naviguer sereinement. Tous avec nos jumelles nous scrutons la toundra et les pentes rocheuses, à la recherche du moindre point blanc ou beige. Un renard encore en pelage d’été semble rogner quelque chose. Serait-il à l’une de ses caches ? enterre les surplus de nourriture dans des caches pour les conserver pour les moments où la nourriture est rare, une stratégie de survie essentielle. Un harfang des neiges vole tout près, lorgnant probablement sur le butin. Notre recherche sur plusieurs kilomètres reste infructueuse… c’est aussi cela l’exploration.
Nous rentrons déjeuner au bateau et nous réchauffer un peu. Mais nous ressortons vite, afin de retourner voir l’ours du matin. Calme absolu. Pas d’ours en vue. Le plus grand carnivore terrestre est parfois très bien camouflé au milieu de la rocaille s’il ne bouge pas. Peut-être est-il dans un renfoncement en train de dormir ? Ou bien a-t-il finalement quitté l’île ? Soudain un point blanc attire nos yeux… aux jumelles aucun doute, c’est le museau d’un ours ! Il se lève et s’approche de nous avec un pas vif. C’est un autre individu que celui qui nous avons vu le matin. Plus svelte, plus petit, certainement une jeune femelle. Elle est très curieuse et vient nous renifler jusqu’au bord de la berge. Puis s’assoie et s’allonge, semblant attendre que notre zodiac dérive jusqu’à elle. Magique. Le soleil illumine son pelage et la toundra rousse qui l’entoure. Elle se relève en nous voyant prendre de la distance quand nous repositionnons notre embarcation. Quel animal majestueux ! Nous sommes à 50 m à peine. Pas de signe de stress ni d’agressivité, elle se rallonge, tête sur ses pattes avant. Nos appareils photos mitraille. Un moment d’émotion qui restera en mémoire.
Nous passons un long moment à la contempler, ravis, puis rentrons au bateau car nous avons une longue traversée à faire pour rejoindre Ittoqqotoormiit.
Au réveil, le Nanook est au mouillage devant Ittoqqortoormiit, le village le plus isolé de la côte est du Groenland. Ses petites maisons colorées accrochent la lumière sur leur promontoire rocheux, contraste saisissant avec l’immensité sombre du Scoresby Sund. Fondé en 1925 par l’explorateur danois Ejnar Mikkelsen, ce hameau reste un point d’ancrage unique entre tradition inuit et modernité.
Nous débarquons en zodiac près de la petite plage, à côté de laquelle attendent de nombreux chiens de traîneau, silhouettes nerveuses, aboyant vers le large comme pour nous rappeler que l’hiver approche. Pas de neige à cette saison : les traîneaux patientent, rangés à l’écart.
Le village est paisible. C’est dimanche, la supérette est fermée, et seules quelques silhouettes croisées rompent le calme des ruelles. Nous découvrons des lieux improbables : un terrain de football en synthétique, véritable rectangle vert au milieu de l’Arctique, puis la montée vers le petit héliport qui relie ce bout du monde au reste de la planète. Sur le chemin, plusieurs lièvres arctiques bondissent tout près de nous, observant nos pas avant de disparaître dans la toundra. Depuis les hauteurs, la vue embrasse l’ensemble du fjord, théâtre de tant d’aventures passées. On pense au Français Jean-Baptiste Charcot, qui cartographia cette côte en 1932 à bord du Pourquoi-Pas ?, laissant une empreinte précieuse pour la connaissance du Groenland.
En début d’après-midi, nous quittons le village pour une navigation en zodiac dans le Vikingebugt. Le soleil brille haut dans le ciel, et la lumière éclaire le fjord d’une clarté cristalline. Les falaises se dressent comme des murailles sombres. Sur certaines parois apparaissent de spectaculaires orgues basaltiques, colonnes régulières semblant sorties d’une cathédrale minérale. Plus loin, des cascades glacées figées descendent des hauteurs, saisies dans leur chute.
Sur l’eau, un phénomène fascinant se produit : la naissance de la glace. Une fine pellicule de frasil recouvre peu à peu la surface, donnant l’impression que le fjord se fige sous nos yeux. Le zodiac fend cette matière fragile, laissant une trace argentée éphémère. C’est comme assister au premier souffle de l’hiver arctique.
Au retour vers le Nanook, le soleil décline, et la magie opère une dernière fois. Les icebergs se parent de teintes pastel – roses, mauves, bleues – tandis que l’océan reflète ces nuances en s’embrasant de couleurs de feu. Le fjord devient un tableau vivant, où la glace et la lumière dialoguent dans un silence total.
Cette journée, entre la rencontre intimiste d’Ittoqqortoormiit et l’émerveillement glacé du Vikingebugt, cette dernière sortie zodiac restera gravée dans les mémoires et un petit avant-goût de l’immensité du Scoresby Sund.
Navigation vers Constable point pour prendre l’avion le lendemain matin.
Ici le spectacle ne s’arrête jamais, peu après le diner, nous avons le droit à un fabuleux ballet d’Aurore Boréale, des drapées incroyables.
Nos passagers ont des étoiles pleins les yeux et des souvenirs plein la tête , ce fut un séjour extraordinaire.
Suivez nos voyages en cours, grâce aux carnets de voyages rédigés par nos guides.
Messages
Il n'y a pas de messages pour le moment
N'hésitez pas à leur en laisser un !