Élodie Marcheteau
Géologie
16 septembre
25 septembre 2025
Élodie Marcheteau
Géologie
Certaines photos photos d’illustrations ont été prises lors de précédentes croisières en Arctique. Le manque de connexion internet nous empêche de recevoir les photos en temps réel.
C’est à Johannesburg, en Afrique du Sud, qu’une partie de notre groupe se retrouve pour débuter ce voyage au coeur de l’Afrique australe. L’enthousiasme est déjà là, l’impatience de découvrir, ou redécouvrir pour certains, ces différents lieux qui vont tour à tour ponctuer notre séjour: Chobé, Kariba, chutes Victoria, Okavango. Autant de symboles de notre immersion dans ces terres africaines où Nature et histoire humaine sont intimement liés.
Accompagnés de notre guide Élodie, notre petit groupe s’envole de nouveau pour rejoindre le Botswana, et plus précisément la ville de Kasane située au Nord-Est de ce pays un peu plus grand que la France. Peuplée d’environ 10 000 habitants, Kasane se situe non loin du point des quatre frontières, seul point au monde où quatre pays se touchent: le Botswana, la Namibie, la Zambie et le Zimbabwe.
Après un vol calme nous permettant de survoler les premiers paysages de savane arborée où s’épanouissent acacias et baobabs, la chaleur nous accueille à la sortie de l’avion, premières sensations qui nous accompagneront tout au long de notre séjour. Nous retrouvons bientôt les derniers participants, le groupe est maintenant au complet et prêt pour les formalités administratives nécessaires à notre entrée sur le territoire namibien. La première partie de notre séjour va en effet s’articuler autour de la rivière Chobé, frontière naturelle entre le Botswana au Sud et la Namibie au Nord.
Après cette dernière étape, le dépaysement commence déjà: à bord du bateau à fond plat qui sera notre transport pour les prochains jours, la faune aviaire se dévoile dans sa diversité et son abondance. D’abord les échassiers, avec les cigognes à bec jaune dont la couleur étincelle dans la lumière de fin de journée, réunies sur des blocs rocheux dépassant des eaux du Chobé.

Peu farouches, les adultes se laissent approcher alors que les juvéniles au plumage et au bec gris gardent leurs distances. La présence d’un petit crocodile, certainement âgé d’un an, ne les dérangent guère : largement plus grosses que ce prédateur carnivore opportuniste, elles ne se sentent guère menacées. Plus loin, ce sont des cormorans d’Afrique qui ouvrent leurs ailes pour sécher et augmenter leur température corporelle, favorisant ainsi la digestion, alors que plusieurs anhingas laissent voir leur long cou dépasser de l’eau. Dans ce décor verdoyant, la magie opère déjà, et sur notre parcours jusqu’à notre lodge, ce sont encore plusieurs espèces d’oiseaux que nous contemplons, leur vol léger se reflétant dans l’eau paisible du Chobé.
Alors que nous arrivons à l’embarcadère, des formes brunes arrondies sortent lentement de l’eau: d’abord une narine, puis un œil qui nous a déjà repéré sous l’eau: pas de doute, les hippopotames sont tout proches! Restant observateurs discrets, ils s’immergent rapidement, nous laissant sur notre faim, mais avec la certitude que d’autres rencontres sont à prévoir !

L’arrivée à notre lodge est bienvenue, la fatigue du trajet commençant à se faire sentir. Idéalement situé en bordure du Zambèze, nous jouissons d’un accueil chaleureux au Cascades Lodge et d’une fabuleuse immersion dans la nature environnante. Après un moment de rafraîchissement, nous retrouvons nos guides pour un moment convivial introduisant le programme de la journée de demain et des points d’histoire sur la Namibie et notamment la bande de Caprivi.
Après un délicieux dîner en terrasse, le bercement du bruit du Zambèze invite chacun à trouver du repos. Demain notre journée dédiée à la rivière Chobé commencera aux premières heures du jour.
Bercés par les eaux calmes du Zambèze, notre première nuit au Cascade lodge fut celle de la récupération après notre voyage depuis l’Europe. Le soleil teinte timidement le ciel de violet lorsque nous nous levons ce matin, les ombres encore bien présentes. Ce lever matinal nous permet de profiter de la fraîcheur du début de journée, et ce faisant de maximiser nos chances de voir des animaux. Notre activité de la matinée est en effet un safari, le premier de notre séjour, mais loin d’être le dernier ! Après le passage de frontière désormais classique, nous passons le portail d’accès au parc national de Chobé, zone de 11 700 km2 située sur la rive Sud de la rivière, au Botswana.
A bord d’un 4×4 couvert, nous partons sur les pistes sableuses accompagnés d’un guide du parc. Les regards sont attentifs, chaque zone est scrutée avec l’espoir de percevoir un animal. Très rapidement, nous voilà récompensés: en bordure de la piste, un groupe d’éléphants traverse devant notre véhicule, certains prenant leur temps, d’autres s’empressant de gagner les arbustes, les derniers hésitant devant notre présence.

Nous gardons le silence pour encourager son passage, et c’est après cette première rencontre avec le plus lourd mammifère terrestre que nous poursuivons notre découverte du parc. Nous reverrons avec plaisir cet animal symbole de l’Afrique australe, la rivière Chobé étant en effet mondialement connue pour abriter l’une des plus grandes populations d’Afrique, avec un pic de rassemblement pendant la saison sèche (d’avril à octobre) lorsque les animaux viennent s’abreuver et se baigner dans ses eaux.
Beaucoup plus discret et usant de son mimétisme en cette saison où la végétation est quasiment absente, le grand koudou se démarque pourtant par ses oreilles très développées et ses magnifiques cornes noires spiralées chez le mâle. Se reposant à l’ombre des arbustes secs, il nous laisse contempler sa robe beige barrée de lignes plus claires, et son élégant visage où deux lignes blanches se rejoignent entre ses yeux. Nous laissons cette belle antilope pour en découvrir une autre en bordure de rivière, l’impala. Rassemblées en plusieurs dizaines d’individus, elles s’alimentent des herbes bien vertes des berges, cohabitant avec les ibis falcinelles, les vanneaux à tête blanche et les spatules. La gracieuse impala prend parfois la pose, nous permettant de contempler sa robe beige évoluant vers le blanc sous son ventre. Le tableau se complète encore avec l’arrivée de la girafe, sa démarche lente aussi unique que les tâches dont son poil est décoré. Atteignant les plus hauts arbres, la girafe a un rôle majeur dans la dispersion des graines de certaines espèces d’arbres comme l’acacia, mais est aussi la sentinelle de la savane, informant par sa fuite les autres animaux de la présence d’un prédateur.

C’est d’ailleurs l’un d’eux que nous avons la chance d’observer ensuite : de sa démarche royale, un vieux lion se déplace entre les bosquets, sa crinière brune auréolant son visage aux yeux d’or. A la recherche d’ombre, il s’allonge bientôt à proximité d’un buisson, respirant rapidement pour dissiper sa chaleur interne. En goûtant à sa présence, à son aura, il est facile de comprendre pourquoi certains le considèrent comme le roi des animaux. Un peu plus loin, toujours à l’ombre, ce sont cette fois des lionnes et quelques jeunes mâles qui sont repérés. Alors que la chaleur est maintenant bien présente, ils se reposent, minimisant leurs mouvements, attendant la tombée de la nuit pour se mettre en chasse de leur prochain festin.

Sur le retour vers l’entrée du parc, nous avons la chance de voir un hippotrague noir, majestueux avec ses longues cornes noires courbées, puis un grand groupe de babouins chacma, mâles, femelles et petits passant au pas de course devant notre véhicule pour rejoindre un grand arbre.
Nous rejoignons ensuite les rives du Chobé, où nous embarquons sur un bateau agrémenté d’une table magnifiquement décorée: notre déjeuner sur l’eau nous attend ! C’est au gré des flots que nous dégustons un repas délicieux préparé par une chef locale, interrompu par plusieurs observations exceptionnelles de crocodiles se reposant sur les berges, d’éléphants se rafraîchissant dans l’eau, de babouins buvant à la rivière ou encore de buffles se déplaçant dans les herbes hautes. Cette balade nautique nous fait faire le tour de l’île de Sedudu, objet d’un conflit territorial entre la Namibie et le Botswana dans les années 1990. L’affaire pris tellement d’ampleur avec des tensions militaires que les deux pays portèrent l’affaire devant la cour de justice internationale qui jugea que l’île revenait au Botswana, le Chobé étant plus profond côté namibien, définissant ainsi une frontière physique. Le paysage dans lequel nous évoluons est un véritable tableau par les contrastes de couleur des herbes sèches jaunes, des marais verts, des collines rouges et du ciel bleu. Nous ne nous lassons pas de cette atmosphère paisible sublimée par les grandes aigrettes, les oies d’Égypte et les jacanas d’Afrique. Pourtant le temps est venu de rentrer au lodge, l’après-midi touchant à sa fin.
Après un temps de rafraîchissement bienvenu, notre groupe se retrouve autour de nos guides pour revenir sur les observations de la journée et évoquer le programme du lendemain. La soirée est l’occasion de partages sur cette première journée, et de faire plus ample connaissance entre les membres du groupe.
Le Zambèze est toujours là pour nous bercer, et bientôt chacun prend le chemin de sa chambre. Le repos est de mise pour se préparer à une nouvelle journée de découverte demain, orientée sur la culture et la vie namibiennne sur l’île d’Impalila.
Le soleil dépasse tout juste des arbres bordant le Zambèze lorsque est nous nous réveillons ce matin. Nos guides nous ont donné rendez-vous un peu plus tard, car ce n’est pas à la rencontre d’animaux que nous allons ce matin, mais des femmes et des hommes dont nous sommes actuellement les voisins. Après un agréable petit déjeuner dans les lumières du levant, nous nous acheminons vers notre bateau pour traverser le bras du Zambèze qui nous sépare de l’île d’Impalila sur laquelle sont situés les villages que nous allons visiter ce matin. L’un de nos guides habite l’un d’eux, et c’est avec amour et fierté qu’il nous décrit la vie dans cette communauté namibienne.
L’île d’Impalila est une terre allongée de 12 kilomètres de long sur 4 de large, limitée au Nord et à l’Est par le Zambèze, au Sud par la rivière Chobé et à l’Ouest par le canal Kasaï, jonction entre les deux. La pointe Est de l’île correspond à l’extrémité orientale de la Namibie, point de jonction avec la Zambie, le Botswana et le Zimbabwe, terminaison ultime de la bande de Caprivi. Cette situation particulière est une contrainte importante pour les 1500 habitants des 35 villages de l’île: bien qu’elle bénéficie d’une école gratuite pour les enfants de 6 à 17 ans, d’un dispensaire, d’un effectif policier, les grandes villes aux alentours sont celles des pays frontaliers, la capitale régionale Katima Mulilo se trouvant à près de 180 kilomètres. De par cet isolement, chaque village est organisé pour maintenir le plus d’entraide et d’esprit communautaire possible, facilité par le fait que chaque village correspond à une famille élargie dirigée par un chef élu par les villageois, rendant compte à une autorité traditionnelle, juge de paix des différentes affaires de la vie quotidienne. La proximité du Zambèze est ce qui rend ici la vie possible. Le grand fleuve, 4ème d’Afrique avec ses 2750 kilomètres, est le principal pourvoyeur de nourriture et d’eau nécessaire à la vie humaine comme aux différentes cultures organisées en jardins, mais aussi au bétail. Ces précieuses ressources sont aussi en partie vendues dans les pays frontaliers comme source de revenus. Aujourd’hui, environ 40% des personnes actives de l’île travaillent dans le tourisme dans la zone namibienne du Chobé, et cette activité est ce qui crée le plus de richesse pour les habitants de l’île.
Alors que nous déambulons dans le premier village, notre guide nous réjouit d’une multitude d’informations, d’anecdotes sur la vie quotidienne ici, répondant à nos questions avec humilité et humour. Il nous parle notamment des différents types d’habitations que nous pouvons voir autour de nous. Les maisons traditionnelles sont faites à partir d’une structure en bois d’acacia, bois très dur peu attaqué par les insectes, recouverte par la terre de termitières, mortier naturel consolidé par la salive des termites elles-mêmes. Le toit de chaume traditionnel est aujourd’hui souvent remplacé par de la taule, plus légère et moins soumise au risque d’incendie. Ces constructions simples n’ont pour toute ouverture qu’une porte, participant à conserver un peu l’ombre et la fraîcheur, et ont l’avantage d’être construites rapidement et à faible coût, tous les matériaux existant sur place. Toutefois, aux premières pluies, le mortier se désagrège, et il faut attendre la saison sèche pour les reconstruire. De ce fait, d’autres maisons faites de pierres volcaniques sont réalisées par ailleurs, mais nécessitent l’achat de ciment, coûteux, tout comme le troisième type d’habitation faite de briques. Ces maisons sont durables mais plus longues à construire par les matériaux qu’elles nécessitent. Après cette observation passionnante, nous sommes escortés au deuxième village où nous attendent un groupe de femmes dont les danses et les chants rythmés par leurs jupes de graines nous transportent dans une ambiance festive et joyeuse. Les percussions des hommes accélèrent parfois, alors que certains de notre groupe sont invités à se laisser porter par la musique et les voix délicates des chanteuses en se joignant aux danseuses. Un petit marché artisanal nous fait découvrir leur art riche en animaux symboles de la région comme l’hippopotame, la girafe ou le crocodile, alors que la vannerie mêle différentes couleurs et types de matériaux. Touchés par cette première rencontre, nous sommes ensuite conduits au village de notre guide, organisé autour d’un baobab vieux de 1500 ans, où d’autres danses et chants nous sont proposés.
La visite de l’île se termine à proximité de l’école et du dispensaire, structures indispensables au maintien de cette communauté. Nous nous sentons privilégiés d’avoir eu l’opportunité de rencontrer ces femmes et ces hommes dont les conditions de vie au quotidien est si différent de ce à quoi nous sommes habitués dans le nôtre. Des rencontres peut-être éphémères, mais qui resteront gravés dans nos mémoires pour tout ce qu’elles ont créé en nous.
De retour au lodge, un délicieux repas nous est offert par le chef qui a cuisiné pour l’occasion des mets locaux qui ravissent nos papilles. Alors que certains poursuivent l’après-midi en s’essayant avec succès à la pêche sur le canal Kasaï, d’autres se reposent, restant au frais des chambres ou de la piscine.
Nous ressortons en fin d’après-midi, alors que le soleil descend déjà à la limite des roseaux. Nos guides nous ont préparé une surprise, un moment convivial au coucher du soleil autour d’un verre marquant la fin de notre séjour dans cette région du Chobé qui nous a tant offert. Nous trinquons à la générosité de la Nature pour tout ce qu’elle nous a offert en seulement deux jours, et à la joie des rencontres humaines qui font l’ambiance chaleureuse au sein de notre groupe. Alors que le soleil se pare de rose et de violet avant de descendre dans la brume du soir, nous apprécions notre chance d’être là.
De retour au lodge, nous partageons le dîner dans une ambiance où les partages sur le vécu de la journée sont de mises. La soirée s’achève bientôt, il est temps de commencer à préparer les valises. Demain est un grand jour, car nous quitterons la Namibie pour rejoindre la deuxième étape de notre séjour, le lac Kariba au Zimbabwe.
Notre dernier réveil au Cascades Lodge est celui des préparatifs. Nous nous apprêtons à quitter ce petit paradis où nous avons été choyés pendant deux jours entiers. Nous remercions chaleureusement ceux qui nous ont accueillis avec tant de gentillesse et de générosité, participant à faire de ce séjour sur le Zambèze un souvenir inoubliable. Nous empruntons pour la dernière fois le canal Kasaï pour rejoindre le poste frontière et quitter officiellement la Namibie, slalomant entre les bancs de sable où se reposent ici et là des crocodiles. L’un d’eux a la bouche grande ouverte, laissant voir clairement la taille de ses dents: le crocodile est en effet un gand carnivore, capable d’attraper d’un seul coup de mâchoire des antilopes telles que les impalas ou les cobes à croissant. Animal ectotherme, le crocodile ne produit pas lui même sa chaleur interne mais utilise l’énergie du soleil comme support à sa digestion et à ses processus physiologiques, qu’il capte par sa gueule béante. Ce cousin moderne des dinosaures impressionne par son regard vert pénétrant et par sa rapidité à soudain rejoindre l’eau lorsqu’il se sent dérangé.

Après avoir dit au revoir à la Namibie, nous poursuivons la matinée par une croisière sur le Chobé où d’autres observations nous attendent. Les berges sont les zones de prédilection des oies d’Égypte et de Gambie cohabitant avec les vanneaux armés, les aigrettes et autres ibis sacrés. Se déplaçant rapidement dans les zones humides grâce à ses larges pattes, le Jacana d’Afrique semble flotter sur la surface de l’eau, ce qui lui a valu son surnom d’oiseau de Jésus. Plus loin, ce sont plusieurs couples de martin pêcheurs pie qui se manifestent en bordure des berges sableuses où leurs nids sont installés. Leur plumage blanc tacheté de noir diffère d’un sexe à l’autre, les mâles semblant revêtir un élégant costume trois pièces, alors que la femelle porte deux tâches noires arrondies sur le haut de la poitrine. Certains sont posés sur l’extrémité de roseaux tandis que d’autres réalisent leur vol stationnaire typique préalable à leur plongée pour attraper les petits poissons dont ils s’alimentent.

Bientôt nous arrivons sur une zone où nous retrouvons de grands troupeaux d’impalas, plus loin des hardes d’éléphants et des groupes de buffles, tous occupés à se nourrir des herbes et racines de l’île sur laquelle ils se trouvent. A proximité des éléphants, nous avons la chance d’observer un hippopotame hors de l’eau, arrachant les herbes avec ses grosses lèvres puissantes. Bien que l’hippopotame privilégie le milieu aquatique pour se préserver de la chaleur du soleil, certains individus sortent durant la journée pour s’alimenter avant de retourner au frais jusqu’au moment de ressortir à la nuit tombée. Celui-ci trouve bientôt une flaque de boue dans laquelle il s’immerge, protégeant ainsi sa peau recouverte de poils épars des rayons intenses. Jusqu’au bout le Chobé nous aura comblés de son ambiance unique, et nous garderons longtemps en mémoire cette abondance de vie.

Il est maintenant temps de quitter ces eaux pour poursuivre notre parcours le long du Zambèze et rejoindre notre prochaine destination : le lac Kariba au Zimbabwe. Depuis l’aéroport de Kasane, nous prenons les airs pour survoler la frontière, suivant en permanence le cours du large Zambèze. A mesure que nous prenons de l’altitude, nous prenons conscience des nombreuses méandres au niveau desquels se détachent de petits îlots. Poursuivant vers l’Est, le cours calme du fleuve s’interrompt pour se déverser dans les gorges de Batoka au niveau des magnifiques chutes Victoria. A cette distance de plusieurs kilomètres, leur beauté est déjà perceptible et c’est dans quelques jours que nous y goûterons encore davantage.
Pour le moment, c’est le lac Kariba que nous découvrons petit à petit, grandiose depuis les airs avec ses couleurs de bleu et de vert. D’une superficie de 5600 km2, le lac de Kariba est l’une des plus grandes retenues artificielles au monde, et la première en termes de volume avec 180 milliards de mètres cubes. Retenant les eaux du Zambèze, le lac constitue la frontière naturelle entre la Zambie au Nord et le Zimbabwe au Sud. Nous découvrirons au cours des prochains jours la riche histoire de sa construction réalisée entre 1955 et 1959.
L’avion se pose à l’aéroport de Kariba, ville de près de 30 000 habitants située à l’extrémité Est du lac. Après les formalités d’entrée au Zimbabwe, nous sommes accueillis par notre guide qui nous escorte vers l’embarcadère où se situe notre cocon pour les prochains jours, l’African Dream. Construit en 2018 à Harare, capitale du Zimbabwe, il fut acheminé par la route en pièces détachées puis assemblé à Kariba, une performance technique qui en fait un navire unique. Après les consignes de sécurité indispensables avant la levée des amarres, nous prenons le temps de prendre nos marques dans le navire, et déjà de profiter des ponts extérieurs et pour certains du jaccuzi. Le soleil prend rapidement sa couleur rose typique des soirées africaines, se reflétant dans les eaux calmes du lac.

A la nuit tombée, notre guide Élodie nous parle de l’histoire du Zimbabwe et répond aux nombreuses questions liées au lac sur lequel nous naviguons. Après la présentation de l’équipage et du cocktail de bienvenue, nous dégustons un somptueux repas dans une ambiance détendue. Le navire est arrivé à destination dans la baie de Changa, et c’est bercés par les quelques vagues du lac que nous nous endormons, impatients de découvrir demain notre nouveau terrain de jeu.
C’est dans la paisible baie de Changa, au Sud-Ouest de la ville de Kariba, que nous nous réveillons ce matin, après une nuit calme dans le confort de l’African Dream. Les premiers rayons du soleil révèlent les paysages que nous entourent, faits de bancs de sables recouverts d’une végétation éparse, qui se densifie à mesure que l’on s’éloigne des berges du lac pour aller vers les montagnes de Matusadona. Nous aurons l’occasion dès demain d’explorer davantage cette savane arborée.
Aujourd’hui, nos activités sont concentrées sur le lac Kariba dont l’immensité nous donne la sensation d’être en bord de mer. Au-delà des petites îles à proximité, seul l’horizon s’ouvre, semblant interminable. La largeur du lac peut en effet s’étendre sur près de 40 kilomètres, alors que sa longueur totale est de 220 kilomètres. D’une profondeur moyenne de 30 mètres, certains zones peuvent dépasser les 70 mètres, ce qui explique qu’il constitue la retenue artificielle la plus volumineuse au monde. Toutefois, sur les bordures, seuls quelques mètres recouvrent les terres, expliquant l’abondance des hippopotames qui marchent davantage qu’ils ne nagent.

Notre première activité de la journée nous emmène à la découverte de ces berges où nous avons en effet l’opportunité d’observer plusieurs radeaux d’hippopotames, groupes familiaux dirigés par un mâle dominant accompagné de ses femelles et des petits. Certains se montrent timides, nous observant furtivement derrière leurs paupières à fleur d’eau avant de replonger plusieurs minutes sous l’eau. D’autres sont plus curieux, restant davantage en surface, maintenant toutefois toujours leurs distances en raison des petits. Il est sage que nous gardions les nôtres également, l’hippopotame étant un animal extrêmement territorial, capable d’attaquer un visiteur non désiré, même dans l’eau. Chaque année, il est responsable de la mort de près de 200 personnes et est à ce titre considéré comme l’animal le plus dangereux au monde.
Non loin d’eux, des éléphants mâles profitent de l’eau mélangée à la boue pour s’asperger et recouvrir leur peau fine de cette couche qui les protège du soleil tout en les débarrassant des parasites. Les berges sont également occupées par les impalas qui viennent s’abreuver, cohabitant tranquillement avec les marins-pêcheurs pie, les échasses blanches, les hérons à dos verts ou encore les oies d’Égypte.

La vie est ici abondante, adaptée à cet environnement complètement redessiné par la construction du barrage achevée en 1959. Avant l’ennoiement des terres, la région était constituée de grandes plaines recouvertes de forêts de mopanes et d’acacias, lieu de vie d’une faune dense et diversifiée, ainsi que de près de 57 000 Tongas, peuple d’agriculteurs bénéficiant de l’irrigation du Zambèze. La montée des eaux entraîna le déplacement de ces Hommes qui durent se reconvertir pour la plupart en pêcheurs, les terres où ils furent placés peu fertiles et adaptées pour le bétail. Les animaux quant à eux n’eurent d’autre choix que de trouver refuge sur des îlots, ou furent contraints de nager pour rejoindre les rives. Devant cette détresse animale, un ranger du parc de Matusadona, Rupert Fothergill, lança l’opération Noé pour secourir les animaux et les sauver des eaux en les replaçant dans le parc national. Avec l’aide de son équipe et de volontaires, en l’espace de 4 ans, 6000 animaux furent récupérés, dont des grands félins, des rhinocéros noirs,des antilopes, des singes ou encore des serpents. L’engagement de Fothergill eut un tel impact que son nom est aujourd’hui encore symbole de ce dévouement à la nature et aux animaux du Zimbabwe, et a été donné à l’une des îles proches du parc de Matusadona. Ce changement brutal provoqua également la mort des forêts de mopanes et d’acacias. En raison de leur bois extrêmement solides et peu soumis au pourrissement, leurs troncs subsistent encore aujourd’hui, dépassant de l’eau comme autant de silhouettes figées dans le temps.
Slalomant entre les troncs, nous rentrons bientôt au navire après cette belle matinée. Durant le déjeuner, le navire se déplace un peu plus au Sud vers la baie des Palmiers où nous voyons déjà plusieurs hippopotames hors de l’eau pour notre plus grand plaisir.
Alors que nous ressortons en fin de journée pour poursuivre notre découverte du lac, ce paysage désolé de forêts aux allures de fresque pétrifiée prend des allures mystiques. Nous sommes dans un autre monde, figé et en même temps bien vivant. Alors que les hippopotames nous offre un spectacle de bâillements laissant voir leurs incisives faites pour le combat et la défense, sur les berges nous avons la joie de découvrir une nouvelle espèce d’antilopes avec une famille de Cobes à croissant. De couleur beige, cette espèce dépendante de l’eau comme l’illustre son nom anglais de « waterbuck » se distingue par son croissant blanc sur l’arrière train. Soudain, une forme particulière se distingue par ses trottinements et sa queue bien fournie: des chacals s’approchent pour disparaitre rapidement derrière la colline. Complétant ce tableau, une famille de babouins chacmas s’installe sur les pentes verdoyantes. Nous installant un peu plus loin, une activité de pêche nous est proposée, alors que le soleil décline, colorant le ciel de rose et de violet. Un tilapia est pêché mais sera relâché dans les eaux du lac.

A la nuit tombée, nous rentrons au navire, enchantés de notre merveilleuse journée. Après la présentation du programme de demain, le dîner est servi et la soirée se déroule dans la bonne humeur, dans les grondements sonores des hippopotames. Le repos est bienvenu, demain nous réserve encore de belles surprises.
Les premiers rayons du soleil colorent le ciel de notes pastels de rose et de violet, comme un cocon de douceur pour nous réveiller. Le calme règne sur la baie des Palmiers alors que nous nous préparons à la deuxième journée sur le lac Kariba.
Les hirondelles à tête rousse volent autour du navire, se posant parfois sur les amarres en nous regardant de leur jolie tête couronnée de rouge. Le vent qui a soufflé cette nuit est tombé, apportant des eaux calmes et sans vagues. Néanmoins, ce matin l’état du lac importe peu, car nous avons seulement un court trajet jusqu’au débarcadère où nous attendent deux rangers et deux véhicules : ce sont eux qui nous mèneront à la découverte du parc national de Matusadona durant toute la matinée. A la suite de la construction du barrage de Kariba achevé en 1959, une grande majorité des terres jouxtant le lac devinrent au fil des années des zones protégées et exemptés de chasse, préservant ainsi la faune mais aussi la flore de la région. Créé en 1975, le parc national de Matusadona comprend une grande partie de la zone Sud-Est du lac Kariba, avec une superficie de 1470 km2, ce qui en fait le cinquième plus grand parc du Zimbabwe. C’est sur les rives du lac que nous commençons notre exploration, zigzaguant sur les pistes sableuses. Le paysage ici est somptueux : le contraste de l’herbe verte, du sable rouge et du bleu du lac dessinant un tableau chatoyant sur fond d montagnes éclairées par le soleil. C’est dans cet environnement magnifique que nous apercevons les premières impalas. A cette période de l’année, les femelles sont pour la plupart gestantes, et mettront bas au début de la saison des pluies d’ici quelques semaines, profitant du retour de la végétation luxuriante pour se nourrir à profusion et allaiter leur petit. Pour le moment, elles restent en présence du mâle dominant, le groupe évoluant tranquillement sur les prairies verdoyantes des berges du lac, se mêlant sans animosité aux autres clans. Quelques mâles font preuve de démonstration de force à proximité, les cornes dressées face à l’autre pour impressionner le rival, finissant par s’éloigner après quelques secondes. La période du rut est achevée depuis longtemps, mais cela n’empêche pas certains de maintenir une attitude de domination sur les concurrents. Les gracieuses impalas partagent cette oasis herbeuse avec les phacochères, créatures aussi étranges que fascinantes. Se nourrissant principalement de racines, de bulbes et de baies, ils les déterrent à l’aide de leur puissant groin et de leurs défenses, qu’ils utilisent aussi bien pour le fouillage que pour se défendre contre les prédateurs. Leur posture sur les genoux amuse, mais elle est pourtant indispensable à leur alimentation, leur cou étant trop court pour atteindre correctement le sol sans cette stratégie. Poursuivant notre route le long des berges, nous repérons bientôt un héron Goliath, splendide avec son long cou pourpre et impressionnant par sa taille pouvant atteindre 1,50 mètres. Il s’agit en effet du plus grand de tous les hérons, avec une envergure les ailes déployées jusqu’à 2,30 mètres. Sa taille massive contraste avec celle des aigrettes et autres échasses blanches qui s’affairent à proximité.
Nous nous enfonçons bientôt un peu plus vers l’intérieur des terres, à travers une forêt de mopanes, l’arbre papillon, nommé ainsi en raison de la forme de ses feuilles. Soudain, traversant la piste, des éléphants nous surprennent : nous les laissons passer, leur pas lent nous permettant de profiter du spectacle de ces pachydermes qui rejoignent paisiblement leurs congénères en bordure de lac. Nous profitons d’une pause pour observer ces grandes hardes qui se détachent sur le bleu profond du lac. La scène invité au silence et à la contemplation. Sur le chemin qui nous ramène à la rive, à l’ombre d’un arbre, celui que nous avons espéré dès le matin en suivant ses traces se trouve juste en bordure de piste: un lion de 3 à 4 ans se repose. Peu intéressé par notre présence, il lève la tête pour la reposer tranquillement et replonger dans son repos. A ces chaudes heures de la journée, le lion privilégie le repos à l’ombre pour réguler sa température, se déplaçant au gré des mouvements du soleil. Ce n’est qu’à la nuit tombée qu’il deviendra actif, et se mettra en quête d’une proie. Ce jeune mâle est en effet seul, ou peut appartenir à un petit groupe de jeunes mâles comme lui, indépendants des groupes familiaux qu’ils chercheront à intégrer dans quelques années, lorsque le moment de construire leur propre famille se fera sentir. Sans lionnes pour leur apporter la nourriture, ils chassent eux-mêmes des proies comme les impalas. Le jeune mâle garde sa posture alors que nous le laissons à son repos pour rejoindre l’African Dream.
Après la visite du poste de commandement animée par notre commandant, nous profitons d’un délicieux déjeuner alors que le navire se met en route pour rejoindre notre dernière étape de la journée, l’île d’Antelope, à proximité de Kariba.
Durant l’après-midi, notre guide locale Vanessa nous présente son pays, le Zimbabwe, nous parlant avec amour de son histoire, de sa culture, de son économie, répondant à toutes nos questions sur le sujet. Cette présentation est suivie d’un film sur la construction du navire, nous illustrant les prouesses humaines du chantier naval à Harare, capitale du Zimbabwe, jusqu’à son assemblage final à Kariba à près de 400 kilomètres de là.
Après ce moment d’échanges, nous reprenons l’annexe pour la dernière sortie sur le lac. Nous approchant de la côte, des silhouettes rayées attirent notre attention : des zèbres sont rassemblés non loin de l’eau, mêlés à des groupes de Cobes à croissant. Notre approche est limitée par les nombreux radeaux d’hippopotames et par la faible profondeur d’eau sur cette partie du lac. Toutefois, les ongulés restent bien visibles, leurs belles rayures se détachant sur l’herbe. Notre dernier coucher de soleil sur le lac est magique, l’astre rouge descendant peu à peu derrière les bois morts émergeant des eaux, nous plongeant dans un décor mystique. C’est dans les lumières violacées du ciel que nous retrouvons le bord.
Juste avant le repas, notre guide Élodie revient à travers des cartes sur notre trajet depuis le début du séjour, nous parlant notamment du Zambèze, fil rouge de nos aventures, puis nous présente les chutes Victoria que nous découvrirons demain. Après une belle surprise de la part de notre équipage, la soirée se déroule dans la bonne humeur et les impressions enthousiastes sur la journée.
Après cette belle journée, l’heure est à la préparation des valises et au repos, car dès demain, l’aventure se poursuit.
Au lever du soleil, l’African Dream quitte la petite anse d’Antelope island en direction du port de Kariba. Le vent des jours précédents est complètement tombé, et malgré que l’astre solaire soit toujours bas dans le ciel, la température est déjà chaude. Les valises se bouclent, les portes des cabines se ferment sur cette partie du séjour. Avec émotion, nous disons au revoir à toute l’équipe qui nous a si bien reçu et fait découvrir les merveilles du lac Kariba. Avant de quitter la région, nous avons l’opportunité de rejoindre un point de vue sur le barrage, nous permettant d’apprécier la structure de cet ouvrage d’art dimensionné par l’ingénieur français André Coyne, architecte des barrages de Bort-les-orgues et de Serre-Ponçon. Barrage voûte de 630 mètres de large sur 128 mètres de haut, il fournit 70% de l’électricité du Zimbabwe, le reste provenant de centrales à charbon. La Zambie bénéficie également de cette hydroélectricité, le barrage étant situé à la frontière entre les deux pays, et envoie une grande partie de cette énergie vers le Nord du pays pour l’extraction du cuivre. Dominant le barrage, une créature à tête de serpent et au corps de poisson veille sur les eaux du Zambèze. Symbole protecteur du fleuve, le dieu « Nyami Nyami » tel qu’il est nommé pour les habitants de la région est toujours vénéré par les populations dépendant des eaux du Zambèze pour leur survie. Pourvoyeur de nourriture et d’eau pour les Hommes et les animaux, il est celui qui décide de l’abondance des pluies tout en préservant les terres des inondations. Lorsque la construction du barrage de Kariba commença en 1955, le peuple Tonga mis en garde sur la colère du Dieu qui allait se retrouver séparé de sa déesse habitant les gorges en aval. Les crues exceptionnelles de 1956 ralentirent les travaux de construction, causant même le décès de plusieurs ouvriers sont les cours furent emportés par les eaux dechainees, un signe que les Tongas prirent pour la manifestation du mécontentement de Nyami Nyami. Sacrifiant un veau noir pour l’apaiser, il est dit que dès le lendemain, les corps furent retrouvés, et que les eaux retrouvèrent rapidement leur calme. Depuis, le dieu continue de protéger le fleuve et ses habitants, veillant sur la structure du barrage. Sous surveillance constante, le barrage fit l’objet de réparations au cours des années précédentes pour maintenir l’homogénéité du béton et des différents ouvrages. Après un dernier regard sur cette réalisation fabuleuse qui nous a permis de vivre l’expérience magique du lac de Kariba, nous retrouvons le chemin de l’aéroport où nous attend le petit avion qui nous mènera aux chutes Victoria. Un dernier au revoir, un dernier merci chaleureux à notre guide Vanessa et nous voilà dans les airs, survolant les côtes déchiquetées de la rive Sud du lac. Les petits bateaux de pêche au kapenta sont bientôt des points minuscules, et les arbres morts seulement de petits traits dépassant de l’eau bleue. Nous longeons le Zambèze, majestueux depuis notre vision aérienne, ses grands méandres serpentant dans les terres sableuses recouvertes de savane arborée. Bientôt son lit se creuse, dessinant les magnifiques gorges de Batoka puis, en amont, les impressionnantes chutes Victoria.
Connues depuis des milliers d’années par les peuples autochtones comme en témoignent les nombreux artefacts datés du Paléolithique supérieur, les chutes Victoria ne furent documentées qu’à partir du 18ème siècle par les Européens. Celui qui les rendît célèbres est le missionnaire écossais David Livingstone, qui, au cours de son voyage en Afrique centrale en 1855, fut mené par des hommes de la tribu des Makololo jusqu’à une île dominant les chutes, île qui porte aujourd’hui son nom. Impressionné par leur majesté, il les nomma Victoria en l’honneur de la reine de l’empire britannique de l’époque et initia l’intérêt pour la région. Près de 30 ans après l’annexion de ce qui fut la Rhodésie du Sud par l’Empire colonial britannique, le tourisme commença à se développer grâce à la construction d’une ligne de chemin de fer reliant Gaborone au Botswana à l’Ouest de la Zambie. Le pont traversant le Zambèze est encore emprunté aujourd’hui par le Royal Livingstone Express, train à vapeur souvenir d’une période révolue.
Au-delà de leur histoire humaine, les chutes Victoria sont également un site naturel remarquable qui leur a valu en 1989 leur inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO sous le nom de « Mosi oa Tunya », littéralement « la fumée qui gronde », nom traditionnel donné par les Makololo. Débutant la visite sous un grand soleil, nous comprenons rapidement l’origine de ce nom décrivant la densité des gouttelettes d’eau émises par les chutes dessinant un rideau de fumée, dans un bruit permanent de cascades. Dégueulant dans un canyon de roches basaltiques long de 1,7 kilomètres, les chutes Victoria culminent à leur point le plus haut à 108 mètres. En saison sèche comme aujourd’hui, le débit est de 3000 m3 par seconde, pouvant s’élever à 30 000 m3 par seconde à la fin de la saison des pluies. Arpentant le sentier aménagé, nous découvrons chaque cascade avec émerveillement, jusqu’aux fameuses cataractes du Diable résonnant dans l’étroit canyon. Sublimant cette visite déjà magnifique, deux arc-en-ciels s’étirent d’une berge à l’autre, comme un lien subtil entre ces terres qui furent un jour une seule. La visite s’achève au sol, et après un délicieux déjeuner en bordure des chutes, la majorité du groupe saisit l’opportunité de les survoler en hélicoptère. C’est une tout autre perspective qui nous est offerte depuis les airs, et nous comprenons davantage l’origine géologique des gorges expliquée par notre guide Élodie. Les anciennes failles furent creusées au fil des millénaires par l’eau du Zambèze chargée de sédiments, processus qui est encore à l’œuvre aujourd’hui, et qui reconfigurera les chutes dans les millénaires à venir. Ces échelles de temps nous semblent insaisissables, et elles le sont: profitons donc de ce spectacle fabuleux tel qu’il est maintenant ! Et en cet instant, nous sommes certes au-dessus de la Nature, et pourtant nous nous sentons tellement petits face à elle.
Après cette expérience magique, nous rejoignons notre hôtel à Victoria Falls pour nous rafraîchir avant de profiter d’un dîner en extérieur en bordure de Zambèze où nous attend une belle surprise. La journée s’achève, mais quelle journée! Nous nous souviendrons longtemps des chutes Victoria, et comprenons aujourd’hui pourquoi elles sont considérées comme l’une des 7 merveilles du monde. Le repos est bienvenu pour chacun, demain est une grande journée qui nous mènera vers la dernier étape de notre séjour : le Delta de l’Okavango.
Le soleil est déjà haut quand nous nous réveillons ce matin sur les hauteurs de Victoria Falls, dans notre hôtel Elephant Hills. La vue sur une partie de la ville nous permet d’en apprécier l’étendue, contraste évident par rapport aux villes de petite importance que nous avons vues jusqu’à présent. Nous profitons des prestations offertes par l’hôtel avant de fermer les valises et de rejoindre notre mini-bus. C’est en effet par la route que nous rejoignons la frontière zimbabwéenne pour repasser une nouvelle fois au Botswana. Bordée par une savane arborée plus ou moins dense, la présence d’animaux que nous avons vus durant nos safaris nous rappelle encore une fois que la vie sauvage est ici partout, et que nous sommes juste invités à la rencontrer. Un groupe de zèbres broute les herbes hautes, des impalas traversent la route avec grâce, une girafe s’accommode du feuillage d’un acacia, deux éléphants s’aspergent de boue dans une mare en train de sécher.
Autant de scènes animant notre route jusqu’à la frontière. Après les formalités administratives nécessaires à notre entrée au Botswana, nous rejoignons l’aéroport de Kasane que nous connaissons bien désormais, et montons rapidement à bord d’un avion taxi en direction de Santawani, notre zone d’atterrissage dans le Sud-Est du delta de l’Okavango. La brume de chaleur est épaisse aujourd’hui, malgré tout au fur et à mesure nous percevons les grands méandres bleus et les marais verdoyants de ce delta qu particulier.
Le delta de l’Okavango prend sa source sur les hauts plateaux de l’Angola, récupérant les eaux du Cubango et du Cuito se rejoignant en un point appelé l’entonnoir de Dirico. De là, après une partie rectiligne de plusieurs dizaines de kilomètres où les rivières sont réunies, différents bras se séparent, suivant des structures géologiques contrôlant l’orientation des cours d’eau. La présence de ces grandes fractures dans les sables du Kalahari est à l’origine de ce qui fait la particularité de ce delta qui ne rejoint jamais la mer. Le delta de l’Okavango est en effet un delta intérieur s’interrompant au Sud en raison de plusieurs failles dans lesquelles la majorité de l’eau disparaît. Nous avons encore une fois la chance de découvrir un lieu exceptionnel tant par son origine que par la faune qui y est présente aujourd’hui.
Le survol en avion permet de découvrir l’extrémité Sud du delta, cette partie relativement sèche qui ne verdit qu’en saison des pluies. Vues du ciel, les routes empruntées par les éléphants forment un tissage unique tant les croisements sont nombreux. Quelques éléphants sont d’ailleurs repérés depuis les airs, s’abreuvant à des mares isolées. L’arrivée de notre avion est un souvenir mémorable, l’atterrissage se faisant sur une piste en terre au milieu de nulle part. Pourtant, les 4×4 qui s’avancent vers nous alors que l’avion s’immobilise nous montrent que nous sommes bien attendus. Les rangers du Rra Dinare Camp nous accueillent avec enthousiasme, et rapidement nous partons sur les pistes sableuses en direction de notre lodge. Notre première découverte du delta commence, avec ses buissons verts, ses mopanes desséchés aux rares feuilles et ses acacias imposants. Les impalas se montrent bientôt, toujours fidèles notre passage. Toutefois, une autre présence se fait bientôt remarquer : deux lionnes sont étendues au pied d’un arbre, profitant de l’ombre bienfaitrice en ce milieu de journée où la chaleur est a son comble. Restant aux aguets, l’une d’elle nous regarde, semblant évaluer notre présence. Restant silencieux, nous profitons de cette proximité pour observer le corps puissant de ces lionnes bâties pour la chasse.

Nous les laissons à leur repos pour poursuivre notre trajet vers le lodge, voyant au passage quelques calais à bec rouge et plusieurs zèbres. Arrivés au lodge, nous sommes accueillis par les chants des femmes, une attention touchante qui nous fait sentir « à la maison ». Après un temps de découverte du camp, d’une installation rapide et d’une pause rafraichissante, nous repartons déjà pour notre safari de l’après-midi.
Nous croisons la route de plusieurs girafes en train de se nourrir sur les hautes feuilles des arbres, d’un rollier à long brin remarquable par ses magnifiques ailes turquoises et un couple de phacochères assez peureux. Approchant d’un bras de rivière, nous apercevons un groupe de trois jeunes lions, deux femelles et un mâle, étendus de tout leur long en bordure de l’eau, profitant de l’humidité du sol pour se rafraîchir. L’un d’eux daigne relever la tête a notre approche, mais les deux restes restes profondément endormis. Ces grands prédateurs nous paraissent si vulnérables en cet instant mais nous ne nous fions pas à cette impression trompeuse, car d’ici quelques heures, à la tombée du jour, ils retrouveront leur énergie et se mettront en chasse. Nous laissons ces grands prédateurs pour poursuivre notre route, émerveillés par cette observation déjà fabuleuse, loins de nous douter de ce qui nous attend. Nous quittons les berges des marais permanents pour nous aventurer dans un zone aride où nous croisons de nombreux groupes de zèbres des plaines. Fascinés par leurs rayures uniques, nous les regardons passer et s’acheminer vers une zone ouverte où ils bénéficieront d’une vue dégagée pour voir venir les prédateurs. Leur nombre est impressionnant, nul doute que certains doivent faire le repas de quelques carnivores. Non loin de là, cette hypothèse se vérifie: allongés près d’une termitière, légèrement en hauteur, une fratrie de quatre guépards se repose.

Bien connus des rangers et de notre guide Élodie, ces magnifiques félins nous offrent un spectacle fabuleux par leur calme et leur tolérance de notre présence. Soudain, l’un d’eux se lève. Puis c’est un deuxième et finalement tout le groupe qui et debout, tourné vers un groupe de zèbres en approche. Nous les observons observer, se déplacer avec légèreté du groupe de zèbres, se préparant à une potentielle attaque. De nouveau, ils s’arrêtent, jugeant de la situation. La configuration a changé et nous sommes témoins d’une coopération incroyable entre les espèces : plusieurs girafes se sont immobilisées à proximité des zèbres, signalant ainsi la présence des prédateurs. Puis ce sont d’autres girafes qui approchent, formant une véritable barrière entre les guépards et les zèbres qui petit à petit s’éloignent, hors de portée de la fratrie.

Comprenant l’échec de la tentative, les quatre frères se rallongent, la partie est terminée pour ce soir. Nous sommes émus par cette scène de vie dont nous venons d’être témoins à travers cette résistance silencieuse des herbivores envers les carnivores. Les lois de la Nature ne sont pas toujours celles-ci, mais quelles qu’elles soient, nous nous sentons privilégiés d’y avoir assisté.
Après avoir célébré ensemble notre arrivée dans l’Okavango au coucher du soleil autour d’un verre, nous rentrons à la lueur des phares et des torches des rangers.
Le dîner aux saveurs africaines nous attend, s’achèvant de manière festive par l’anniversaire d’un membre de notre groupe. Accompagnés par nos guides, attentifs à la faune présente autour de nos tentes sur pilotis, nous rejoignons nos chambres. La fatigue du voyage et les émotions des dernières heures ont raison de notre veillée. Le sommeil est bienvenu, car demain une grande journée nous attend.
Il fait encore nuit noire lorsque les rangers viennent nous réveiller, leurs lampes torches éclairant les moustiquaires de nos tentes sur pilotis. Au Rra Dinare Camp, chaque habitation est aménagée sur de grandes plates-formes de bois reliées entre elles par des passerelles permettant localement le passage des animaux. Ici, pas de clôtures: nous sommes sur le territoire des animaux du delta, et c’est à nous de nous adapter à leur présence permanente en agissant avec conscience et prudence. Les bruits de la nuit nous ont bien illustré que nous cohabitons avec des animaux tels que les buffles, les éléphants ou encore les hippopotames. Les rangers veillent donc à notre sécurité en nous escortant lors de nos déplacements de nuit. Nous les suivons jusqu’à la terrasse où brûle un feu agréable, débutant la journée au rythme des animaux qui s’éveillent avec le soleil : juste devant nous, des cobes leschwe mangent, leur robe rouge luisant au soleil levant. Le ciel se pare de rose à mesure que le soleil s’élève au-dessus de l’horizon. C’est dans cette ambiance somptueuse que nous partons en 4×4 pour notre safari de la matinée.
Sitôt sortis des environs du lodge, les impalas sont au rendez-vous, nous regardant de leurs yeux aux longs cils. Des girafes étirent leur long cou pour atteindre les feuilles les plus hautes, gorgées de soleil et de chlorophylle. En raison de ses longues vertèbres pouvant atteindre près de 3 mètres de long, la girafe possède un gros cœur lui permettant de garantir une bonne irrigation du cerveau lorsqu’elle est en position debout. A l’inverse, lorsqu’elle penche la tête vers le bas pour boire, un système de valves coronnaires ralentit l’afflux afin que le cerveau ne soit pas saturé d’oxygène. Soudain, notre pisteur remarque des empreintes sur la piste: des lycaons sont passés par là, et les traces sont fraîches ! Commence alors une traque de celui qui est appelé ici « the painted dog », le chien peint, en raison de son pelage tacheté de différentes couleurs. Nos guides scrutent chaque croisement, chaque changement de direction. Nous prenant au jeu, nous regardons dans toutes les directions, attentifs au moindre mouvement. Notre guide s’arrête parfois, éteignant le moteur et tendant l’oreille à l’affût du cri caractéristique du chien sauvage. Après plusieurs détours, débouchant sur une mare desséchée, un spectacle exceptionnel se dévoile devant nos yeux : la meute est là, et elle compte une trentaine d’individus dont 11 petits de 3-4 mois. Nous sommes subjugués par la scène : les adultes nous regardent nous approcher, alors que le mâle dominant vient au plus près de notre véhicule, nous fixant de ces yeux profonds. Sa tête et son cou couverts de sang nous indiquent que la meute s’est certainement nourri ce matin. Les petits chahutent entre eux, et soudainement harcèlent la femelle dominante, quémandant de la nourriture qu’elle leur donnera par régurgitation. De nouveau en mouvement, la meute se disperse dans les fourrés, mais nous parvenons à la suivre pendant un long moment, ne manquant rien de ces scènes de vie si rarement observées. Le lycaon est en effet un canidé sont la population dans l’Okavango est faible, menacé par l’humain qui n’hésite pas à le tuer quand il s’approche trop près du bétail. Le lycaon fait l’objet de suivis, d’études dans la concession privée où nous nous trouvons et le chercheurs œuvrent pour la méditation avec les fermiers et leur sensibilisation à la protection de ce prédateur essentiel à l’écosystème du delta. La concurrence avec la hyène tachetée est pour lui très importante et favorise sa fragilisation. L’une d’elle sort d’ailleurs d’un buisson, observant le groupe comme pour imposer sa présence, provoquant le départ de la meute. Un grand groupe comme celui-ci trouve sa force dans le nombre face aux hyènes ou aux autres prédateurs, toutefois cela demande un apport supérieur en nourriture qui n’est pas toujours disponible, avec pour conséquence une forte mortalité des jeunes. Leur tolérance à notre présence est incroyable pour cet animal si prompt aux déplacements furtifs. Nous prenons la mesure de la chance que nous avons de vivre cette rencontre avec cette meute, et lorsqu’il s’éloignent de nouveau, c’est avec le coeur rempli de gratitude que nous les laissons s’éloigner. Le safari se poursuit avec d’autres magnifiques observations de zèbres et d’hippopotames se désaltérant dans les marais, de babouins et de phacochères courant de part et d’autre du véhicule, ou encore de grands koudous se dissimulant entre les mopanes décharnés. En bordure de rivière, les aigrettes blanches étirent leurs longues pattes dans l’eau, alors qu’un jabiru nous ravit par les couleurs rouges et noires de son long bec. Le charme de l’Okavango opère, le temps n’existe plus, il semble que nous avons toujours été ici, et que nous pourrions y rester pour toujours.
La fin de matinée approche et la chaleur est maintenant installée: le moment est venu pour nous de rentrer au lodge pour nous rafraîchir, et pour les animaux de rester cachés aux heures les plus chaudes.
C’est en fin d’après-midi que nous ressortons, certains pour profiter d’une balade en mokoro sur l’un des bras de l’Okavango, d’autres pour un deuxième safari terrestre. Traditionnellement réalisées dans le tronc de l’arbre à saucisse, les mokoros sont aujourd’hui fabriqués en fibre de verre, plus légère et plus résistante. Pirogue dirigée par un batelier, elles accueillent deux passagers qui font l’expérience de la vue du delta à fleur d’eau. Le glissement du mokoros à la surface de l’eau est une expérience pleine de douceur et d’apaisement qui réjouit nos passagers du jour. Avant l’activité, tout le monde profite du 4×4 pour profiter de l’atmosphère de fin de journée, propice à l’observation des animaux qui petit à petit sortent des refuges ombragés. Et en effet, après une approche sur les pistes de sable mou, nous voici devant l’un des grands prédateurs de la savane, pour certains le roi des animaux : le léopard. Installé en bordure de route à proximité de son arbre où gît une carcasse d’impala, le jeune mâle reste à l’ombre, probablement pour digérer son copieux repas comme le montre sa respiration rapide. Sa fourrure tachetée est unique, faite de rosettes noires dont le centre est blanc. Moins haut que le guépard mais plus solidement bâti, le léopard a la particularité de monter ses proies en hauteur pour les protéger des autres prédateurs grave à sa mâchoire puissante et à sa grande musculature d’épaules et de poitrine. Grâce à cette adaptation physique, il est capable de hisser des proies pesant deux fois son poids à plus de 6 mètre de haut. Aujourd’hui, nous l’observons au sol, mais cette proximité est absolument étonnante. Nous sommes ébahis de pouvoir être aussi proche de ce grand prédateur solitaire. Nous le laissons à son repos et reprenons bientôt le chemin de la rivière. Sur le chemin, un lion à la belle crinière foncée et une lionne sont observés en train de dormir, ainsi que des tsessebés, des éléphants et des zèbres débutant leur chemin vers les plaines pour la nuit.
C’est au coucher du soleil que nous nous célébrons notre dernière soirée ensemble, nous réjouissant de tous ces moments passés ensemble, des découvertes, et bien sûr, des rencontres humaines. A la lumière des torches, nous revenons vers le lodge, contemplant une dernière fois dans le ciel la croix du Sud. Le repas est festif et marqué par des échanges avec l’équipe du lodge. Remplis de tous les merveilleux souvenirs de la journée, nous retrouvons nos tentes tout confort. Le sommeil nous surprend, bercés par les bruits de la vie nocturne.
Notre dernière matinée au coeur de l’Okavango débute avant le lever du soleil. Comme la veille, nos rangers viennent nous réveiller pour nous escorter à la terrasse où est servi le petit déjeuner. Ce matin, ce sont les buffles qui font le spectacle, mais qui sait, peut-être sommes-nous le leur ? La tête levée, ils nous observent calmement, avant de poursuivre leur chemin dans les marais. C’est avec émotion que nous regardons pour la dernière fois le soleil se lever sur ce paradis terrestre. Nous nous impregnons de chaque couleur, de chaque forme, de chaque visage pour les garder intacts dans nos mémoires.
Mais le voyage n’est pas encore fini, un dernier safari nous attend. Et comme disent nos guides : « allons voir ce que Mère Nature est prête à nous offrir aujourd’hui »! La fraîcheur du matin nous enveloppe alors que le 4×4 s’élance sur les pistes sableuses. La température de l’aube fait sortir les herbivores qui s’avancent vers le lit de la rivière: impalas, zèbres et cobes leschwe lèvent un œil curieux à notre passage, certains sautant gracieusement vers les buissons, surpris par le bruit du véhicule. Alors que nous observons un jabiru, grand échassier reconnaissable par son long bec rayé de noir et de rouge, des cris au loin attirent notre attention : des hyènes tachetées font entendre leur cri caractéristique d’une chasse. Nous voilà partis sur les pistes sinueuses, évitant les branches épineuses des acacias, slalomant entre les arbres décharnés par la sécheresse de fin d’hiver. Guidé par les cris intermittents et les traces de pattes imprimées dans le sable, notre guide trouve un chemin étroit entre les bosquets d’épineux. Ce n’est pas des hyènes que nous découvrons, mais la meute de lycaons que nous avons suivie la veille ! Quelle surprise touchante de retrouver ces chiens sauvages généralement si difficiles à observer, là encore réunis entre adultes et petits. Nous arrivons juste au moment où deux adultes se disputent les restes d’une impala certainement tuée le matin même. Les cris des hyènes que nous avons entendus proviennent certainement d’une tentative de récupération de la proie, avortée par la force de la meute. Plusieurs lycaons passent près de nous, la tête ensanglantée : certainement les premiers sur l’antilope, ils ont dû manger à leur faim. Toutefois une seule impala ne suffira pas pour cette meute importante, et les adultes devront repartir en chasse rapidement pour subvenir aux besoins de tous. L’un des lycaons a récupéré la tête, et s’installe devant notre véhicule pour la déguster. Ainsi sont les lois de la nature sauvage : pour que certains vivent, d’autres doivent mourir. Nous restons à observer le comportement et les interactions entre les adultes et les petits. La femelle alpha nous dépasse bientôt, se dirigeant dans les fourrés. Quittant notre poste d’observation, nous la retrouvons en bordure de rivière, guettant avec d’autres adultes l’arrivée de nouvelles proies. Nous les laissons, un au revoir ému à ces lycaons menacés par leur interaction avec l’Homme. Poursuivant notre chemin vers une partie inconnue de la réserve, nous longeons des zones arides où nous découvrons des gnous bleus en petits groupes, suivis par des aigrettes blanches à l’affût d’insectes chassés par la queue de l’animal. A proximité, des zèbres broutent, tandis qu’un groupe de tsessebés approche. Les femelles, pleines, marchent lentement, protégées par un mâle placé entre elles et le véhicule. Soudain, une forme s’agite derrière un buisson sec: un chacal à dos noir se détache, sa fourrure bicolore se détachant sur l’herbe jaunie. Certainement à la recherche de petites proies, il s’éloigne bientôt en gardant un œil sur nos activités. Poursuivant à travers les arbres, nous nous arrêtons pour observer un rollier à longs brins. Ce petit insectivore est l’un des plus colorés de la région, avec sa poitrine lila, sa tête verte et ses ailes turquoises. Une véritable œuvre d’art à lui seul! Furtif, il s’envole rapidement, profitant des mouvements d’air produit par notre véhicule pour attraper les insectes. Alors que nous sommes sur le chemin du retour, une forme dénote en bordure de rivière : couchée à quelques mètres de l’eau,une silhouette tachetée se détache du bleu de l’eau. Une femelle guépard se repose, profitant de la fraîcheur des berges tout en guettant l’arrivée d’imprudents herbivores. Animal solitaire, le guépard ne retrouve ses congénères que pour la période de reproduction, ou pour former des coalitions comme les quatre frères observés précédemment au cours de notre premier safari ici. La femelle guépard s’occupe seule de ses petits pendant environ dix-huit mois, leur apprenant à chasser et à devenir autonome avant de les chasser pour un nouveau cycle de reproduction. Celle-ci pourrait être une jeune femelle qui a quitté la présence familiale il y a quelques mois, se débrouillant très bien pour sa survie. Nous quittons ce magnifique félin qui trouvera peut-être de quoi s’alimenter aujourd’hui. Plus loin, dans les herbes hautes, l’oiseau kori dépasse des hautes herbes. Avec un poids atteignant jusqu’à 21 kg, il est l’oiseau le plus lourd capable de voler, et l’oiseau symbole du Botswana.
De retour au lodge, c’est le coeur gros que nous bouclons nos valises et profitons de la présence chaleureuse de nos hôtes pour des moments touchants de remerciements sincères. Le moment de quitter cet Eden magnifique est venu. Un dernier regard à ce précieux delta source de Vie, aux animaux qui nous ont tant émerveillés et à toute l’équipe qui nous a tant apporté, puis nous voilà de retour sur la piste de Santawani pour prendre l’avion qui nous emmène à Main, située la limite Sud du delta.
C’est ici que le groupe commence sa séparation, certains prolongeant leur séjour au Botswana. Pour d’autres, ce sera à Johannesburg et Paris que chacun reprendra la route vers son quotidien qui ne sera plus jamais le même. C’est avec un peu de chaque personne, de chaque animal, de chaque paysage que nous repartons, ignorant si nous les reverrons un jour. Ce qui est certain en revanche, c’est que toutes ces images vivent désormais en nous, laissant dans le cœur une empreinte indélébile, celle de la Nature et de ses merveilles intemporelles.
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