
Xavier Allard
Arctique
1 juin
10 juin 2025
Xavier Allard
Arctique
Nicolas Hanuise
Biologiste
Certaines photos photos d’illustrations ont été prises lors de précédentes croisières au Spitzberg. Le manque de connexion internet nous empêche de recevoir les photos en temps réel.
Nous voilà tous à bord de l’avion en direction de Longyearbyen. Le vol est magnifique : nous survolons l’archipel, ses montagnes et ses glaciers d’un blanc immaculé.
Dans l’après-midi, nous visitons la petite ville de Longyearbyen, puis nous embarquons sur l’Explorer, notre maison flottante pour la semaine à venir. C’est le grand départ ! Le bateau quitte le quai et nous commençons notre navigation dans l’Isfjord, sous un beau soleil et une mer d’huile. Nous voguerons toute la nuit en direction de la baie de la Croix.
Après un bon petit-déjeuner, nous sommes prêts pour notre première sortie en zodiac. Nous naviguons au milieu des brashs d’icebergs, et nos guides nous donnent une multitude d’explications sur les glaciers et les icebergs. Toute la matinée, nous zigzaguons entre les blocs de glace. Soudain, un énorme pan du glacier se détache dans un bruit assourdissant, semblable à un orage. La houle nous berce doucement.
Un morse est observé, paisiblement installé sur un iceberg. C’est toujours un moment impressionnant : cet animal massif peut peser jusqu’à 1 000 kilos pour les mâles, et ses longues défenses, présentes chez les deux sexes, peuvent atteindre 80 cm de long. Le morse que nous observons semble en pleine sieste, profitant du calme et c’est seulement la houle du vêlage qui le réveil et il lève la tête pour voir ce qui ce passe.
Quelques instants plus tard, un second vêlage tout aussi impressionnant rompt le silence. Nous poursuivons notre exploration et croisons un phoque barbu nageant non loin du zodiac. Sur le chemin du retour, nous apercevons plusieurs espèces d’oiseaux, dont des guillemots et des sternes, posés sur les icebergs.Après cette matinée riche en émotions, nous déjeunons à bord de l’Explorer.
L’après-midi, nous poursuivons notre navigation vers le fjord de Tinayrebreen. En chemin, nous avons la chance d’apercevoir un renard polaire longeant la côte, quelques macareux moines flottant sur l’eau, ainsi que deux autres morses installés sur un iceberg en équilibre. Le contraste entre leur masse imposante et la fragilité apparente de leur plate-forme de glace est saisissant.
Le bateau pénètre dans le fjord, bordé de hautes falaises qui plongent à pic dans la mer. Au fond, un glacier suspendu se jette à la verticale sur plusieurs centaines de mètres.
À 15h45, nous débarquons au fond du Möllerfjord pour une visite de la Lloyd Cabin, vestige des premières croisières dans la région. Nous effectuons une belle randonnée à travers de grands paysages, toujours accompagnés des explications passionnantes de nos guides.
Nous observons une dizaine de rennes, certains s’approchant même de nous. Quelle chance aussi de voir trois phoques communs se prélassant sur des rochers dans la baie juste devant nous !
De retour à bord, certains profitent du sauna avant d’être conviés au verre de bienvenue. Après le dîner, Xavier nous propose une conférence sur le Spitzberg. Entre géologie, géographie et anecdotes, nous apprenons beaucoup de choses sur ce lieu unique.
Nous passons quelques heures au mouillage devant le glacier du 14 Juillet, un splendide glacier entouré de hautes montagnes.
À 23h30, l’Explorer met le cap vers le nord et poursuivra sa route toute la nuit.
Durant la nuit, l’Explorer a quitté la baie du 14 Juillet pour s’élancer vers les confins du Spitzberg, contournant sa pointe nord-ouest dans une atmosphère paisible, à peine troublée par les ondulations de la mer. Ce matin, le ciel reste calme mais voilé, et une douce lumière grise enveloppe notre arrivée dans les parages d’Indre Norskøya, petite île rocheuse battue par les flots et le temps.
Nous partons en zodiac explorer ses rives. Là, au creux des éboulis et des fissures, des milliers de mergules nains s’activent. Ces minuscules alcidés, aussi rapides que discrets, forment des colonies bruissantes, leur vol bourdonnant fendant l’air par vagues successives. Nous restons longtemps à les observer, fascinés par cette vie en perpétuel mouvement, par ce ballet de noir et blanc sur fond de pierre et de neige.
Plus loin, posé sur un rocher, un bruant des neiges se fait entendre : ses notes cristallines, presque fragiles, contrastent avec la rudesse du lieu. Il se laisse admirer un instant, le plumage clair, presque lumineux, avant de s’élancer dans une boucle élégante au-dessus des rocailles.
Nous débarquons ensuite à Sallyhamna, dans une anse abritée marquée par l’histoire. Une hutte de trappeurs se dresse encore, vestige du siècle passé, tandis que les restes de l’époque baleinière — enceintes en pierres des fours à graisse — témoignent d’un temps où ces eaux étaient le théâtre d’intenses activités. Dans une baie voisine, nous avons la surprise d’observer plusieurs phoques communs, installés sur des rochers dans la classique posture dite « de la banane », leurs têtes et queues relevées.
Tout près de là, nous longeons la banquise en zodiac, où nous croisons eiders à duvet et guillemots à miroir, ces derniers reconnaissables à la discrète tache blanche sur l’aile. En début d’après-midi, la lumière se fait plus douce, l’Explorer met le cap vers le Raudfjord, et bientôt, nous pénétrons dans l’un des fjords les plus emblématiques de l’archipel.
Sous un ciel désormais ensoleillé, nous progressons lentement entre les plaques de glace flottante, jusqu’à atteindre les limites de la banquise côtière. Là, posé sur la rive blanche au loin, un ours polaire se laisse apercevoir. Repus, il dort paisiblement, le museau posé sur ses pattes, insensible à notre présence distante. Nous restons en silence, émus de cette rencontre — fugace mais précieuse.
Dans la baie de Hamilton, nous partons à nouveau en zodiac. Au pied des falaises escarpées, un groupe de rennes broute la toundra naissante, épargnée par les dernières neiges. Dans les airs, les mouettes tridactyles crient en tournoyant autour des guillemots de Brünnich qui ont réussi à s’établir sur de minces vires rocheuses. Tout à coup, un renard polaire surgit en contrebas. Il explore les talus, en quête d’un œuf ou d’une charogne, les sens en éveil, le pelage encore en transition vers sa parure estivale.
Nous poursuivons la navigation vers le fond de la baie, en direction du glacier et de la banquise. Deux phoques barbus nagent à quelques mètres, et l’un d’eux entonne une mélodie sous-marine, un chant étrange et envoûtant. Ces moments suspendus sont rares, précieux, et gravés pour longtemps.
Après une dernière navigation entre les plaques de glace, comme si le temps lui-même se mettait à flotter, nous regagnons le navire, le cœur encore imprégné de toutes ces scènes de vie boréale.
Avant le dîner, Nicolas nous réunit au salon pour une présentation passionnante sur les alcidés, ces oiseaux marins emblématiques du Grand Nord. Entre anecdotes et portraits en vol, il nous plonge dans le quotidien de ces espèces fascinantes, du mergule nain aux différents guillemots.
La lumière, elle, ne faiblit pas. Le soleil de minuit caresse les reliefs, et l’Explorer poursuit sa lente avancée au cœur du Nord.
Pour cette matinée nous embarquons à bord des zodiacs pour approcher Alkefjellet. Cette falaise noire volcanique, haute de plus de 100 mètres, s’élève brutalement au-dessus de la mer.
Alkefjellet, qui signifie littéralement « la montagne des Alcidés », est composée principalement de dolerite, une roche magmatique intrusive. Elle date du Jurassique supérieur, formée il y a environ 150 millions d’années lors d’une intense activité tectonique qui a fissuré la croûte terrestre. Ces intrusions de magma se sont figées en profondeur, créant une roche dense et sombre, aujourd’hui exposée par l’érosion. Cette couche résistante repose sur des strates plus anciennes de schistes et de grès sédimentaires.
Ces falaises abruptes, verticales et quasi inaccessibles pour les prédateurs terrestres, offrent un refuge parfait à des milliers de guillemots de Brünnich, accrochés aux moindres anfractuosités de la roche. Le vacarme est assourdissant. En vol, en piqué ou perchés, les oiseaux emplissent le ciel et la mer de mouvement.Le zodiac avance lentement, frôlant les parois. Tout autour, ça vole, ça plonge, ça crie. La vie ici est brute et spectaculaire.
En longeant la base de la falaise, un mouvement attire notre attention sur une étroite langue de terre : un renard polaire. il trottine rapidement entre les rochers, le museau en alerte avec un guillemot encore ensanglanté dans la gueule.
La scène est brutale mais fascinante : la vie sauvage arctique dans ce qu’elle a de plus authentique. Le renard disparaît rapidement avec sa proie, sans se soucier de notre présence.
Après un déjeuner à bord, nous mettons cap sur Torrelneset, sur la terre du Nord Est. Depuis nos zodiacs, nous approchons silencieusement du cap , où l’on devine les formes massives de morses dans l’eau. Ils sont là, paisibles, jouant entre eux à quelques dizaines de mètres à peine. Certains nous regardent longuement, leurs petits yeux sombres dépassant à peine de la surface. D’autres soufflent bruyamment, s’immergent puis réapparaissent plus loin, comme s’ils s’amusaient à nous suivre. Ils ne semblent ni craintifs ni dérangés. La scène est douce, presque familière,
Nous débarquons sur la plage de Torrelneset. Une étendue de galets , dominée par une lumière arctique douce et froide. Allongés sur le rivage, un groupe de morses se repose paisiblement. Massifs, recouverts de cicatrices, leurs corps se touchent, formant une masse presque immobile. Certains grognent, d’autres se glissent avec difficulté dans l’eau glacée.
Nous restons à distance, silencieux, observant ces géants marins dans leur quotidien paisible. Le bateau met le cap en direction du Sud Est nous traversons une mer blanche, après avoir zigzagué entre les plaques de banquise nous atteignons enfin le Brasvellbreen, gigantesque front glaciaire issu directement de la calotte d’Austfonna. Durant la navigation Nicolas nous donne une conférence sur l’histoire de l’archipel.
Après une longue navigation de nuit depuis le majestueux front du Bråsvellbreen, notre navire polaire a repris sa progression vers le nord, franchissant plusieurs zones de banquise dense. C’est dans une atmosphère feutrée, sous un ciel uniformément couvert, que nous découvrons au petit matin l’entrée du fjord de Wahlenberg, bordé de montagnes austères et baigné d’une lumière diffuse.
L’Explorer entame une lente progression le long de la rive sud du fjord, évoluant prudemment parmi les floes tandis que, rivés à nos jumelles, nous sommes tous à la recherche de vie sauvage. Très vite, la banquise se fait plus dense et nous nous retrouvons à la lisière d’un vaste champ de glace. Des dizaines de phoques, allongés au loin, ponctuent ce paysage arctique. Quelques phoques barbus se laissent même observer à proximité, installés sur la glace ou glissant dans les eaux noires, dans une ambiance de grand silence.
Nous embarquons ensuite à bord de nos zodiacs pour une expérience inédite : un débarquement sur une vaste plaque de banquise dérivante. Là, posés sur la glace, nous ressentons toute la fragilité de cet univers mouvant, alors que le pack se déplace rapidement autour de nous. Cette immersion dans le cœur du monde polaire laisse une impression saisissante.
De retour à bord, nous reprenons la mer en direction de la sortie du fjord. Alors que nous contournons les îlots des Gyldénøyane, notre guide Xavier repère fugacement, très loin sur la banquise, un ours polaire qui se déplace parmi les hummocks. Trop éloigné pour une observation détaillée, il n’en suscite pas moins un frisson d’émotion parmi les passagers.
Nous poursuivons notre navigation vers le fond de la baie de Brage, où nous jetons l’ancre pour explorer les environs. Une sortie en zodiac nous mène au pied du glacier de Gimle, dont les séracs bleutés se détachent en une succession de colonnes glacées. De nombreux morses sont présents, tant dans l’eau que posés sur des plaques de glace flottantes. Au-dessus, la calotte glaciaire de Vestfonna se détache sur l’horizon, baignée par les douces lumières d’après-midi qui percent les nuages. Ce panorama grandiose, propre à la Terre du Nord-Est, couronne une journée riche en émotions.
En fin de journée, l’Explorer met le cap vers la baie de Murchison. En navigation, nous retrouvons Xavier au salon pour une passionnante conférence sur les courants marins et la circulation thermohaline. De la dérive nord-atlantique au courant circumpolaire antarctique, nous comprenons maintenant bien mieux le rôle vital de cette circulation océanique sur la régulation du climat mondial et la distribution de la biodiversité marine.
Après le dîner, notre navire parcourt la baie de Murchison, sillonnant l’archipel des Russøyane. Des croix orthodoxes encore dressées vers les cieux changeants y rappellent les anciens temps où les trappeurs Pomors chassaient ours et renards polaires. C’est avec la sensation d’avoir approché de près l’âme de l’Arctique que nous regagnons finalement nos cabines pour la nuit.
À notre arrivée devant la pointe d’Elvetangen, Xavier nous annonce que nous ne pourrons malheureusement pas débarquer sur la plage — mais pour une excellente raison : un ours s’y trouve, occupé à dévorer une carcasse de morse. C’est impressionnant ! Nous pouvons l’observer en train de déchirer la chair avec ses puissantes mâchoires. Peu après, un second ours arrive par la côte pour le rejoindre. Nous avons la chance de les observer longuement à la jumelle. Un moment rare et fascinant.
Après cette belle observation, nous partons en direction de la rive opposée pour le reste de la matinée. En zodiac, nous partons découvrir le glacier de Nordbreen. À peine avons-nous dépassé le cap que Xavier nous annonce une autre surprise : nous allons débarquer pour approcher à pied une échouerie d’une quinzaine de morses. Nous avançons prudemment sur la plage, où l’on trouve du bois flotté et des déchets liés à la pêche en haute mer. À une trentaine de mètres des morses, nous nous arrêtons. Le silence règne. Nous les observons dans leur élément, allongés, grognant parfois, parfaitement indifférents à notre présence discrète.
Nous poursuivons ensuite en longeant la côte vers le Nordbreen. Nous gravissons un petit sommet d’où la vue sur le front du glacier est à couper le souffle. D’immenses blocs d’iceberg dérivent au pied de cette masse bleutée. C’est un moment suspendu, hors du temps. Nous restons là, silencieux, à contempler et méditer devant ce paysage grandiose. Nous faisons un rapide passage en zodiac au pied du glacier avant de retourner au bateau. Durant le déjeuner, celui-ci se repositionne dans le Woodfjord. En chemin, nous avons la chance d’observer un petit rorqual.
À 15h30, nous partons pour une balade à la découverte d’une ancienne cabane de trappeur d’Eiske Bay Hytta. Sur la neige, au bord de la plage, nous repérons des traces fraîches d’ours. Les empreintes sont énormes. Nous enfilons nos raquettes et partons sur le plateau qui surplombe un lac. Xavier nous parle des anciens pièges de trappeurs, comme l’écrasoir à renard : il en reste un visible au sol.
Sur le chemin du retour, nous visitons l’intérieur de la cabane. Modeste mais fonctionnelle, elle contient un poêle à bois, une table, et un lit pour deux ou trois personnes. L’odeur du bois et des peaux nous transporte dans un autre temps, celui où les hommes venaient jusqu’ici pour chasser renards, ours et autres mammifères pour leur fourrure.
De retour à bord, le bateau met cap sur le Liefdefjord. Pendant la navigation, une visite de la salle des machines est organisée : une belle occasion de découvrir le fonctionnement du navire.
À 19h30, nous arrivons devant la banquise, face au glacier de Monaco. Ce paysage est l’un des plus beaux de tout l’archipel. Un silence majestueux règne. Nous passons le dîner à contempler ce paysage puis le bateau reprend ensuite sa route, en direction de notre destination du lendemain, sur une mer d’huile…
Durant la soirée Nicolas nous parle de l’arctique à travers des dessins d’artiste du 19 eme et 20 eme siècle.
Tôt ce matin, notre navire, de retour à la pointe nord-ouest du Spitzberg, atteint le mythique fjord de Smeerenburg. Sous une lumière douce et changeante, nous embarquons à bord de nos zodiacs pour longer le front tourmenté du glacier de Smeerenburg, dont les falaises bleutées se dressent dans un silence solennel. Le calme apparent de la scène est rompu par l’activité effervescente de la faune : les sternes arctiques se livrent à des parades aériennes au-dessus de l’eau, survolant les flots à la recherche de proies. Dans le sillage de nos embarcations, nous avons la chance d’observer dans l’eau claire plusieurs micro-organismes marins, comme des cténophores, de délicates créatures dont les rangées de cils scintillent comme des arcs-en-ciel.
De retour à bord de l’Explorer, nous franchissons le Sørgattet, étroit passage qui permet de rejoindre la baie de la Madeleine, que nous atteignons en début d’après-midi. Nous débarquons sur Gravneset, la presqu’île des Tombeaux, où de nombreux vestiges de l’époque des baleiniers – tombes et fours à graisse – sont visibles. Nous entamons une courte marche jusqu’à un promontoire naturel qui domine le site. De là, la vue s’ouvre sur les montagnes environnantes et les glaces dérivantes qui parsèment la baie.
Puis nous embarquons à nouveau pour une croisière en zodiac sous les pierriers et les éboulis d’Alkekongen : des milliers de mergules nains y nichent et tournoient en nuées denses, dont les battements d’ailes remplissent l’air d’un bourdonnement permanent. Quelques bruants des neiges ponctuent le décor de leurs chants, apportant une note mélodieuse au fond sonore des colonies de mergules.
Sur les petits îlots voisins, nous observons les désormais classiques sternes arctiques et eiders à duvet. Mais nos guides, en ornithologues avertis, repèrent aussi des espèces moins fréquentes comme la harelde boréale, l’eider à tête grise, le plongeon catmarin, la macreuse noire, le labbe parasite ou encore le phalarope à bec large : un véritable festival aviaire !
À l’approche du fond de la baie de la Madeleine, le brash se resserre autour de quelques icebergs bleutés où nous distinguons, à travers un voile de brouillard naissant, deux morses allongés sur un glaçon. Plus loin, dans une petite crique oubliée, quelques phoques communs sont allongés sur les rochers, indifférents à notre passage.
Après cette belle après-midi d’observations, nous regagnons notre navire pour appareiller vers le sud et retrouver bientôt la baie du Roi. En mer, avant le dîner, nous retrouvons Nicolas au salon pour une conférence récapitulative sur les oiseaux du Spitzberg : une occasion de faire le point sur les nombreuses espèces rencontrées au fil de la croisière, et de mieux comprendre les stratégies d’adaptation de cette riche avifaune à la rudesse de l’Arctique.
Aujourd’hui, nous passons la journée dans la baie du Roi. Xavier nous réveille tôt pour nous donner les informations sur le programme. Le paysage est superbe : nous sommes mouillés au pied du glacier de Blomstrand, et au loin, nous apercevons les « Trois Couronnes », emblème du fjord et de l’archipel.
Nous partons en zodiac pour une magnifique sortie le long du glacier, parmi une densité impressionnante d’icebergs. Il y en a de toutes tailles et de toutes formes, certains bleus, d’autres blancs ou translucides. Grâce à nos guides, nous découvrons les particularités de ce milieu polaire. Nous débarquons ensuite sur une plage de gravier, puis entamons l’ascension d’un sommet tout proche. En chemin, nous découvrons de jolies fleurs de saxifrage à feuilles opposées. Le paysage s’ouvre de plus en plus sur le fjord, entièrement recouvert d’icebergs et de blocs de glace.
Nous observons également un lagopède alpin, un oiseau sédentaire qui est blanc en hiver et change de couleur en été pour se fondre dans son environnement. De là-haut, nous avons une vue magnifique sur les glaciers du Roi, de la Couronne, et celui de Blomstrand.
De retour au navire, nous déjeunons, puis nous naviguons autour de l’île de Blomstrand en direction du sud, vers Ny London. À notre arrivée, trois rennes nous accueillent tranquillement, en train de brouter les fleurs de la toundra, juste à côté de nous.
Xavier nous raconte l’histoire de Ny London, un lieu étonnant figé dans le temps. En 1911-1912, un entrepreneur britannique, Ernest Mansfield, y a tenté d’exploiter une carrière de marbre. Il y a fait venir des ouvriers et de lourds équipements d’Angleterre, mais la qualité du marbre s’est révélée trop médiocre pour être exportée. Le site a été abandonné peu après, et on peut encore y voir les restes des bâtiments, des rails, des machines rouillées… un témoignage silencieux d’un rêve industriel brisé dans l’Arctique.
Nous poursuivons notre balade sur un grand plateau rocheux. Les guides nous parlent de la géologie locale et des différentes espèces d’oiseaux observées pendant la promenade : des labbes à longue queue, des hareldes de Miquelon, et même des plongeons catmarins.
Nous découvrons également des phénomènes géologiques comme les plages surélevées, vestiges du rebond post-glaciaire, et l’érosion particulière des roches par le gel, appelée gélifraction.
De retour au bateau, nous mettons le cap sur Ny-Ålesund, l’un des établissements les plus au nord du monde, situé à environ 79° de latitude nord.
Vers 18h30, nous faisons une visite guidée de cette station scientifique. Autrefois village minier, Ny-Ålesund est aujourd’hui un centre international de recherche sur l’Arctique et le climat. Plusieurs pays y ont des bases scientifiques permanentes. Ce lieu a aussi une grande valeur historique : c’est d’ici que l’explorateur Roald Amundsen est parti en dirigeable pour survoler le pôle Nord en 1926. La ville, bien que petite, est un carrefour du savoir sur les régions polaires.
Ce soir, nous célébrons l’anniversaire de Marie Noëlle, ainsi que les 50 ans de Frédéric. La soirée se termine dans la bonne humeur, à discuter, chanter et boire une coupe de Prosecco, alors que nous passons au pied de l’île du Prince Charles.
Après une dernière navigation « de nuit » depuis la baie du Roi, l’Explorer a longé les côtes occidentales du Spitzberg en empruntant le Forlandsundet, étroit passage entre l’île du Prince Charles et l’île principale. Une échouerie de morses est visible sur la langue de sable de Sarstangen, qui vient presque barrer le détroit et rend la navigation délicate. À l’aube, nous pénétrons à nouveau dans le vaste Isfjord, point de départ et d’arrivée de notre périple arctique. Un ciel voilé et quelques gouttes de pluie accompagnent notre entrée dans Trygghamna, la « baie sûre », où la mer est calme malgré le vent soutenu.
Depuis notre mouillage au fond du fjord, nous débarquons en zodiac sur une ancienne moraine frontale recouverte de neige fraîche. Un phoque, curieux, nous observe nonchalamment à quelques dizaines de mètres, comme pour nous souhaiter la bienvenue. En raquettes, nous entamons une belle marche dans un décor grandiose : à nos pieds, un lac de fonte d’un bleu éclatant, alimenté par la neige environnante ; devant nous, la banquise qui ferme le fond du fjord ; et tout autour, les parois sombres d’un amphithéâtre glaciaire qui amplifie l’écho de nos pas feutrés. Sur le chemin du retour vers notre navire, nos zodiacs glissent silencieusement entre les îlots côtiers, où nichent de nombreuses oies bernaches et des eiders à duvet déjà bien installés.
Nous entamons notre dernière navigation à bord de l’Explorer, en longeant les célèbres falaises à oiseaux d’Alkhornet puis de Fuglefjella. Nous apercevons également les vestiges de Grumantbyen, ancienne ville minière soviétique, dont les bâtiments délabrés se dressent encore face à la mer comme une énigme figée dans le temps. Au salon, nous retrouvons Xavier pour une conférence passionnante sur les adaptations au froid de la faune et de la flore arctiques, l’occasion de comprendre les stratégies des espèces que nous avons eu la chance d’observer durant notre séjour.
Dans l’après-midi, nous accostons à Longyearbyen, où une dernière excursion nous attend. Après quelques emplettes dans la ville, nous partons avec Xavier pour un tour en minibus à travers les paysages de l’Adventdal. Des rennes, des bernaches, des eiders et même des plongeons catmarins s’offrent une dernière fois à nos regards attentifs, comme un clin d’œil de la nature pour cette journée de conclusion.
De retour à bord, un apéritif de fin de croisière réunit tout le groupe dans une atmosphère chaleureuse et émue. Les souvenirs défilent, les rires fusent, et les remerciements vont aux guides, à l’équipage, et à la magie du Svalbard. En soirée, nous prolongeons ce moment de convivialité autour d’un dîner au restaurant typique Kroa, à Longyearbyen, dans un décor boisé et accueillant.
Puis il est temps de rentrer à bord une dernière fois, de préparer les bagages, et de se laisser gagner par une douce mélancolie mêlée à la joie d’avoir vécu ensemble une aventure polaire inoubliable. Demain, un dernier tour dans les rues et les musées de Longyearbyen nous attend avant de rejoindre notre avion de retour.
Pour une meilleure expérience, nous vous conseillons de tourner votre tablette en paysage