Comment fonctionne un brise-glace ?

Dans l’histoire de la navigation, nous n’aurons jamais vu autant de navires brise-glaces construits que pendant cette décennie. La Russie se place en tête de file dans le domaine avec des investissements ambitieux dans la construction d’une flotte de navires capables de naviguer toute l’année dans la banquise. Découvrons la force des brise-glaces. 

Un brise-glace, qu’est-ce c’est ?

Comme son nom l’indique, le brise-glace est un navire capable de briser la glace. Il permet d’ouvrir des voies de navigation dans les eaux prises par la banquise. À l’origine, le brise-glace est une pièce de bois à angle aigu posée sur une partie d’un pont et destiné à briser les glaces. Pour pouvoir être qualifié de brise-glace, le navire doit regrouper trois caractéristiques : une coque renforcée pour passer dans la glace, une étrave (la pièce du bateau qui termine la coque vers l’avant) de forme spéciale et une puissance suffisamment importante pour pouvoir avancer. 

Le navire est donc capable de se déplacer en totale autonomie sur tous les points de l’Arctique. Il dégage les voies maritimes toute l’année, les ports, pour que les bateaux de pêche puissent circuler à leur guise sans problème et assurer une navigation toute l’année. Il a également un rôle de sauveteur lorsque les bateaux sont coincés par mégarde dans les glaces.

La naissance du brise-glace

Pour bien comprendre quand et comment est né ce type de navire, replaçons-nous dans le contexte et revenons sur les échecs de la marine dans ce domaine. Il semblerait que tout ait commencé en Allemagne à la fin du XIXème siècle. Un hiver particulièrement rude bloque le port de Hambourg pendant environ 2 mois. Cette situation était catastrophique pour le port qui était une vraie place marchande active et centrale pour l’économie du pays. De nombreux navires ont vu leur coque se fracasser contre la glace. Au vu de cette situation catastrophique, un ingénieur a eu l’idée de modifier la forme de la partie avant des bateaux. Jusque là, les coque se brisaient, elles étaient droites et fines, l’ingénieur leur a donné une forme arrondie qui brise alors les plaques gelées. 

La forme convexe de la coque permet au bateau de se hisser sur la glace et de la briser grâce au poids du bateau. Ce système, très simple, est toujours utilisé actuellement. Les brise-glaces traditionnels ou sophistiqués fonctionnent encore grâce à ce système. Le premier navire conçu pour briser la glace fût le Pilot, en 1870, il était équipé d’une machine à vapeur et a été construit en Russie pour naviguer sur la mer Baltique.

Comment fonctionne le brise-glace ? Un peu de technique

Ce qui rend le navire efficace est la forme de sa proue. La forme de sa coque lui permet de casser la glace, de l’écarter et de passer dans le canal créé. Les brise-glaces de haute mer ou spécialement conçus pour se déplacer dans les régions arctiques sont équipés de moyens plus performants. Leur système de soufflerie, placé sur les flancs du bateau, permet d’écarter et de briser la glace. Ils sont équipés d’une double coque métallique à l’intérieur qui les rend plus efficaces. Ils ont également un système de propulsion plus perfectionné que les navires traditionnels. Ils sont capables de faire marche arrière sans être bloqués. 

Pour éviter d’être pris dans la glace, ils peuvent aussi effectuer des mouvements de roulis (le navire s’incline dans ce cas alternativement sur tribord et sur bâbord). Cela est possible grâce à des ballasts latéraux et à des pompes puissantes. Les ballasts sont des réservoirs d’eau de grande contenance, on les remplit ou on les vidange pour optimiser la navigation, c’est une sorte de lest qui gère la bonne stabilité du navire. La quille ronde des navires les rend donc propices au roulis, pour contrer cela, certains navires utilisent des systèmes antiroulis, il s’agit souvent de ballasts supplémentaires. 

C’est grâce à son poids et à sa puissance que le bateau est capable de monter sur la glace et de la briser. Les brise-glaces modernes sont souvent recouverts de peinture haute performance qui réduit la friction entre la coque et la glace, cela leur permet de faire marche arrière plus facilement. Les navires sont souvent équipés d’une plateforme pour hélicoptères pour la liaison et la reconnaissance. Leur consommation de carburant est très élevée. Ce genre de navire rencontre fréquemment un autre type de problème : sa proue arrondie le rend vulnérable au slamming, ce sont des chocs qui peuvent se produire sur les parties planes du navire, à cause des vagues, lorsque le bateau retombe dans l’eau après avoir émergé. 

Les brise-glaces nouvelles générations

Dans les nouvelles avancées, on peut nommer les pods. Ce sont des propulseurs orientables qui améliorent la manoeuvrabilité et l’efficacité des bateaux. Ces propulseurs sont situés assez profonds pour éviter les chocs avec un bloc de glace, on les retrouve souvent sur les pétroliers. Dans les années 1970, le Canada a été précurseur dans la bonne utilisation des aéroglisseurs comme système de brise glace sur les rivières. 

Parmi les célèbres brise-glaces, on peut citer le Lénine, premier brise-glace nucléaire qui ouvre la voie en 1957, sa construction inspirera de nombreux autres navires. L’autonomie d’un navire moderne peut être portée jusqu’à quatre années en mer. Leur puissance leur permet de créer des failles dans la glace qui peuvent atteindre jusqu’à trois mètres de haut. Le brise-glace le plus puissant au monde est à ce jour l’Arktika II, un navire russe spécialisé dans la navigation en mer gelée. Ce bateau aura coûté près de 1,5 milliard d’euros et il aura fallu trois ans pour qu’il prenne la mer. Il est propulsé à l’aide de réacteurs nucléaires. Les brise-glaces du modèle Arktika peuvent naviguer à pleine puissance pendant 24h et rester plusieurs années sans se ravitailler.

La Russie travaille actuellement à la construction d’un brise-glace capable de passer à travers une couche de plus de quatre mètres de glace. Ce navire deviendrait le plus puissant au monde, baptisé Lider, il pourrait conduire des convois de gros pétroliers, il laisserait derrière lui un passage de 50 mètres de large. Le navire est attendu pour 2023. 

L’avenir nous montrera les innovations en matière de technicité et de puissance … il se pourrait que nous observions l’apparition de super brise-glaces dans les années à venir.